dimanche 19 décembre 2010

Programme commun

A défaut d'avoir conçu un programme communiste les communistes proposent de collecter les intentions populaires à mettre en partage pour déterminer ce que la gauche devra faire.
Ce nouveau programme commun émanerait d'une base populaire à faire adhérer à un projet de changement  calé sur l'échéance des présidentielles de 2012.
Pourquoi pas ? Encore qu'il n'est pas certain qu'il soit judicieux de confier à "l'opinion publique" le soin d'éclairer le débat politique de perspectives de changement.
Rien ne vaudrait une bonne analyse sur laquelle se développeraient des argumentaires idéologiquement bien consolidés avant d'être mis en débat...
Mais bon, pourquoi pas ? Si au moins les communistes y réfléchissent avant d'être appelés à valider une candidature...
Si certains n'y voient qu'une question de détail, cette présentation est pour moi problématique. L'appellation dit au moins trois choses :
  • programme : c'est la mise en perspective des intentions d'action en réponse aux problématiques repérées; et si le programme doit être partagé, il est impératif que le diagnostic l'ait été préalablement puisqu'il détermine les objectifs assignés à l'action. Est-on certain que nos partenaires du Front de Gauche porte la même appréciation sur la situation  politique ?
  • populaire : la référence au peuple ne serait qu'une évidence chez les communistes si depuis quelques années la montée en puissance de la prééminence des propositions des élus sur la réflexion de la base militante de l'organisation simplement appelée à les avaliser, n'avait pas invalidé ce fondamental.
  • partagé : la stratégie du rassemblement à gauche ne peut évidemment pas s'affranchir de cette dimension du partage, de cette mise en commun. Encore faut-il avoir conscience des différences mises de côté pour circonscrire la partie commune des propositions.
Programme commun, Rassemblement populaire majoritaire, Gauche plurielle, collectifs antilibéraux... Rien de nouveau sous le soleil, le fond reste le même : donner l'impression du "tous différents, tous ensemble pour..."

La symbolique de la présentation du cahier citoyen mérite aussi d'être explorée.
  • Logos du Front de Gauche et du PCF côte à côte : il ne fait de doute à personne que le PCF est d'autant plus dans le Front de Gauche qu'il est est le précurseur et le principal "actionnaire". Dès lors les propositions du Programme populaire et partagé sont-elles celles du PCF ou celles du Front de Gauche ? Si ce sont celles du Front de gauche, en quoi se distinguent-elles de celles du PCF. Quelle expression publique des propositions du PCF est confrontée à celles du Parti de Gauche ou de Gauche Unitaire ? 
  • Doigt pointé et main ouverte : la symbolique est belle du doigt qui montre, alerte et de la main tendue. Pour mieux coller aux exigences du moment il manque le poing des luttes qui seront bien indispensables demain pour imposer au capital l'abandon de ses privilèges... Le poing qu'on retrouve à l'intérieur de la brochure est celui qu'on tape sur la table pour se faire écouter, sans garantie d'être entendu. Si la perspective est bien de dépasser la dimension protestataire de l'action politique la main ouverte ne peut qu'être tendue bien au-delà du Front de Gauche à des courants réformistes dont l'histoire nous a trop appris que leur étiquette de gauche tenait plus à leur petit écart à gauche de la droite qu'à des options fondamentalement progressistes. Dès lors le doigt pointé devra bien signifier une forme de seuil de tolérance au-delà duquel les couleuvres deviennent par trop indigestes.
Le concept de Front de Gauche est attaché au fait électoral, à l'ardente nécessité d'être représenté dans le cénacle des élus. Et là l'essentiel du débat ne tourne plus autour des idées, mais des proportions. Comme l'expérience des régionales l'a montré, il est difficile de faire tenir un bouquet dans un soliflore et la place offerte dans l'assemblage ne peut bien se dégager qu'au détriment des autres dès lors que le gain d'audience dans l'opinion ne progresse pas suffisamment.
Si le Front de Gauche n'est pas un parti il serait politiquement correct que chaque candidat du Front de Gauche se réclame d'une de ses composantes. Sauf à considérer que les élections politiques ne sont plus l'affaire des partis et que les militants ne sont utiles qu'à servir l'élite auto proclamée de ses candidats et de ses élus c'est du respect de la place que notre constitution accorde aux partis pour animer la vie politique du pays qu'il s'agit.
Et pour ma part, si je suis bien convaincu de la nécessité d'une profonde réforme constitutionnelle, cette disposition me semble une des garanties fondamentales de la démocratie.
J'ai aussi conscience que cet avis est bien loin d'être partagé par beaucoup qui ressentent le besoin de faire valider les amodiations de leurs engagements dans des pratiques gestionnaires dites "pragmatiques" avec l'exercice d'une soit-disant "démocratie participative". La démocratie a toujours souffert de la confusion du référendum et du plébiscite.

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