lundi 27 mai 2019

Trompe l’œil et théorie du ruissellement

Les résultats des européennes ont conduit dès hier soir à des commentaires et des comportements un peu excessifs ! Entre celui qui gagne et qui revendique une avance sur consommation pour les prochains scrutins et celui qui perd tout en disant qu'il est le seul qui gagne en perdant...il y aurait presque de quoi s'y perdre, et, seule chose certaine, le manque de tenue des échanges sur les plateaux télé, les têtes sont bien malades... Il n'y a plus de débat politique (*) du simple fait qu'il n'y a plus de débat d'idées, remplacé par des postures et des guignolades de marionnettes sur une bande son faite de novlangue fleurissant sur quelques concepts oiseux.
A l'époque des drones, on ne peut pas dire que l’ensemble du personnel politique prenne beaucoup de hauteur.
Pour le reste la gauche en miette perd du terrain, un peu. La droite reste à un niveau fluctuant en fonction des ancrages locaux et l'extrême droite progresse encore un peu, là aussi en fonction de l'ancrage local et de la solidité des forces de droite plus ou moins divisées...
Pour ce qui est des "verts", comme toujours depuis longtemps, cette génération d'apparence spontanée témoigne surtout de l'incurie en matière d'écologie de la plupart des autres formations politiques ; et, au fil du temps on verra, comme par le passé, repartir ailleurs les petits morceaux verts amalgamés pour l'occasion. Et ceci n'altère en rien la sincérité de l'engagement du moment ! 
L'engagement politique est aujourd'hui un produit du marché plus sensible à la séduction que rivé à des convictions, plus attaché à l'image qu'à l'argumentation.
Mais au bout du compte il s'agit surtout d'un jeu d'étiquettes collées sur les boîtes...
L'illusion produite par les identifications aux personnes cache une réalité bien plus simple : le jeu de l'essuie-glace, en place depuis plus de deux siècles continue de fonctionner.
Les courants politiques se font et se défont, autour de noyaux porteurs d'idéologie qui amalgament plus ou moins autour d'eux selon les conjonctures ; et les masses amalgamées sont mobiles, d'autant plus mobiles que les fragments s'amenuisent, tantôt dérivant vers la droite et tantôt glissant vers la gauche. Ne parle-t-on pas de "vagues" dans ces flux et reflux des courants politiques.
Le grand changement de ce nouveau siècle réside plutôt dans la starisation du fait politique ; pour satisfaire aux exigences médiatiques, le casting du jeu politique sélectionne plutôt les "figures séduisantes", plutôt les formats populaires sitcom qu'on fait vendeur avec la cour qui les fait briller. Les cas Sarkozy et Macron sont emblématiques de ce commerce des courants d'opinion sortis des salles des coffres. Même code discursif, même valise de tics, même appétit pour le pilotage à l'émotion... mais n'est pas réalisateur qui veut et ce n'est pas l'ENA qui peuple la montée des marches à Cannes. A force d'aller à la soupe, les politiques d'aujourd'hui font plutôt dans le navet.
Grattez juste un peu l'étiquette de la République en marche et vous allez y retrouver, qui dépasse encore un peu à gauche celle de Bayrou (à portée des deux mangeoires en restant au centre) et celle de la droite bien représentée au gouvernement, et pas qu'à Bercy !
Vous n'avez pas besoin de gratter sous l'étiquette RN pour trouver du même Fhaine tout droit sorti des guerres coloniales, et désormais acoquiné avec la droite de la droite qui ne manque pas d'opportunisme pour flinguer sa propre équipe en passant sur le banc des remplaçants du camp d'à côté, un peu mieux qu'à droite, dans le caniveau... Les indemnités d'élus n'ont pas d'odeur.
Le constat au lendemain du scrutin pourrait être celui de la réussite de la théorie macronienne du ruissellement, non pas dans la perspective d'une répartition des richesses plus équitable, mais plutôt dans la décoloration de l'éventail politique qui fait passer du bleu au bleu marine et au blanc vert de gris, du rose pâle au bleu, du rose au vert et du rouge en miettes...
Contrairement à ce que le macronisme claironne en chœur avec l'extrême droite, les antagonismes d'antan persistent et persisteront toujours tant que le moteur capitaliste empestera l'atmosphère des peuples, et brisant le plus grand nombre pour le confort extravagant de sa petite élite. L'opposition de classe est toujours opérante dans l'analyse de la situation politique ; il suffit de jeter un coup d’œil sur les soutiens financiers des uns et des autres pour s'en convaincre. Bannir les deux mots de droite et de gauche du vocabulaire ne change rien à la chose. Fauchon et les restos du cœur n'ont toujours pas la même clientèle, salle des coffres pour les uns, pendant qu'on coffre les autres qui manifestent... 
Cependant, il ne faudrait pas oublier dans tout ça que les candidats du président de la république et de l'adversaire qu'il s'était choisi pour se mettre en valeur ne recueillent chacun qu'à peu près un suffrage sur dix des citoyens français... Certes c'est beaucoup par rapport aux autres formations qui restent bien loin derrière ; mais c'est bien peu pour fonder la légitimité politique de leur arrogance.
Le constat au lendemain du scrutin des européennes est incontestablement celui d'une crise politique qui s'approfondit encore et dont personne ne peut aujourd'hui imaginer l'issue tant que TOUS les dirigeants politiques regarderont leur petit doigt montrant la lune, court-termismes en mal de mandat.
Pour sauver la démocratie, la République en mal de pensée a besoin de raison, d'esprit, d'intelligence au service du bien public... tout simplement.
Et au lieu de s’époumoner à commenter les sondages qui font l'opinion plus qu'ils ne la décrivent, au lieu de se proclamer pour ou de s'affirmer contre, il devient plus que jamais urgent de chercher à savoir pourquoi, ça suppose une pause réflexive, état des lieux et analyse, établissement de la relation logique des causes et des conséquences, pour que se dessinent les buts à atteindre et que soient déterminés les objectifs assignés à l'action...
Après on aura tout le temps qu'il faut pour crayonner les plans et s'engager dans la reconstruction !
Et, comme disait l'autre "il faut que ce soit fait dans cinq ans !" ?... C'est peut-être possible car il ne s'agit pas de rebâtir une cathédrale, pas plus qu'une chapelle, simplement d'ouvrir la place du débat public, une agora comme disaient les grecs pour faire vivre la citoyenneté politique en chassant les marchands du temple.
Daniel LEVIEUX
27 mai 2019

(*) le clou du spectacle du 26 au soir ne fut-il pas l'arrivée de Tapie servie sur un plateau télé pour vociférer, entre autres propos nauséeux, que le Parti Communiste avait recueilli 29 % des suffrages au sortir de la seconde guerre mondiale pour en être rendu à 2% aujourd'hui...
Effectivement, Pierre Villon, membre du CNR et principal rédacteur du volet économique et social du programme du CNR était communiste et c'est aussi de son parti qu'était issu Ambroise Croizat, ministre de de Gaulle à la Libération. L'Histoire retient que c'est avec lui que s'est construit le modèle de protection sociale aujourd'hui mis en pièce.
Que retiendra l'Histoire de Tapie, sinon son petit talent d'homme "d'affaires" et d'homme politique empêtré dans des histoires de scandales politico-financiers.

A chacun sa gloire !

jeudi 23 mai 2019

étalage électoral

Certains osaient parler de débat... pourquoi pas de grand débat ! Les candidats se sont donnés en spectacle dans la vitrine du petit écran. Et c'est le commerce électoral qui singe les arnaques de la grande distribution. Les produits phares sont en tête de gondole ; du Le Pen ré emballé à trois pour le prix de deux, du Macron avec de la République allégée d'une promesse de 120 000 fonctionnaires en moins... il faut absolument fourguer du Front National devenu rassemblement et de la République en marche vers sa renaissance. Pour le reste vous avez à hauteur des yeux les grandes marques, et plus bas c'est du second choix, du bon marché, marques distributeurs et petits prix à présenter en deuxième partie de soirée... Pour ce qui est de l'emballage, il ne manque pas de couleurs chatoyantes ; mais le produit à l'intérieur ne sortirait-il pas de la même usine ? à défaut d'afficher la composition avec son indice de dangerosité pour la démocratie et la qualité de la vie citoyenne, la plupart des produits se contentent de s'autoproclamer meilleur qu'autre chose.
Point de débat nourri de constructions argumentaires étayées de sources et de références, tout est dans les fanfreluches de l'emballage qui ne doit pas déroger au code de reconnaissance du produit, vraie-fausse indignation, mauvaise foi et faux-semblants, comme au rayon charcuterie, pour bien se vendre le jambon se doit d'être rose et le boudin blanc blanc nacré.
Certains vont se réfugier dans le commerce de niche de la boutique bio de la galerie marchande... mais ça coûte un bras !
D'autre ne viennent plus écarquiller les yeux devant l’étalage des  beaux produits du marché tout frais sorti des chambres froides de l'ENA de Rungis et se satisfont des palettes et des grands cartons du discount...
D'autres n'ont plus de ressources qu'auprès de l'épicerie solidaire et des Restos du cœur... Mais là, on n'achète plus de rêves, pas même de la nécessité, tout juste un aller simple pour l'abstention.
Beaucoup s'accordent aujourd'hui pour reconnaître la piètre qualité des produits politiques. Certains mêmes sont vite découverts avariés avec de sales affaires aux trousses. Tous ces produits de l'industrie politico-alimentaire manquent de goût, de texture, de tenue... et malgré ça, grâce au subterfuge de quelques additifs indemnitaires, ça se conserve ! 

Tout compte fait, à bien y regarder, je n'en vois guère plus d'un dont la composition soit affichée bien honnêtement ; certes c'est un vieux produit qui ne se vendait plus bien depuis quelques temps à force d'être décrié par sa concurrence qui ne rechignait pas à faire passer de la viande blanche pour du veau rosé... Certes cette marque ancienne s'était aussi mal vendue en lot avec d'autres... Beaucoup de supermarchés médiatiques l'avaient déréférencée, pensant même qu'il suffisait de l'oublier pour qu'elle disparaisse... Certains produits dérivés avaient aussi tenté de prospérer à hue ou à dia... Foin de tout cela dimanche prochain ; c'est pour celui là qu'il va falloir voter pour faire reluire le carmin du drapeau et signifier au reste que le peuple mérite mieux que leur clinquant de pacotille.

lundi 20 mai 2019

Elections ?

L'élection européenne, c'est pour très bientôt ; et pourtant les affiches ne sont posées -pour certaines- que depuis hier... Quasiment trois douzaines de panneaux vides, et pourtant radios et télés nous gavent de la course en tête des deux champions du "populisme" crasse Macron et Le Pen.
Tout est fait pour écarter les citoyens de leur rôle démocratique et provoquer une nouvelle vague d'abstention face à ce spectacle pitoyable qui décrédibilise la politique au point d'en faire un avatar de série télé... d'élection en élection, c'est un peu comme "poubelle la vie", on reprend les mêmes, et ça continue.
Le mal est insidieux et s'est infiltré depuis longtemps dans les consciences : les élus se sont éloignés des électeurs et l'exercice de leur mandat s'est le plus souvent traduit par des complications dans la vie des gens.
Les élus municipaux ont perdus de leurs prérogatives au profit des communautés de communes ou d'agglomération qui ont trusté les compétences des communes...
Les élus départementaux ont perdu de leurs prérogatives au profit des régions, puis des plus grandes régions qui ont trusté les compétences des départements.
Les élus nationaux, parlementaires, ont perdu de leurs prérogatives au profit des institutions européennes qui encadrent à grand coups de directives les législations nationales...
Le grand processus de "décentralisation" et les évolutions qui l'ont accompagné n'ont eu de cesse d'éloigner les lieux de décision du terrain de leur mise en oeuvre.
La ficelle était grosse, mais bien peu l'avaient vue, les yeux et les oreilles rivés sur les promesse d'une plus grande proximité !!!
Il n'est jamais plus facile de faire noir que lorsqu'on prétend faire blanc. Quand c'est vu, c'est fait... et c'est trop tard !
Au bout du compte le seul ressort de l'asphyxie démocratique des peuples est l'argent, le pouvoir du fric et le fric au pouvoir.
Dans les communes, plus question de confier le curage des fossés au petit entrepreneur local... Il sera tout au plus sollicité pour fournir un devis et une procédure de marché sophistiquée conduira au résultat attendu, grosse boîte pour empocher le bénéfice avec au besoin l'emploi d'un petit qu'on étrangle en sous-traitance...
Au prétexte de "moraliser"... d'éviter les dérives... on met les opérations à l'abri des regards des citoyens un peu plus loin de chez eux !
Etranges étrangers, les citoyens appelés aux urnes, n'y vont plus pour eux qui font la société, ils délaissent l'étalage d'un marché qui leur est étranger... Ils font désormais leur marché de pseudo citoyenneté sociale sur les réseaux sociaux, oublieux qu'ils sont que c'est dans les urnes que la démocratie se fait... ou se perd ! Comme elle s'était perdue en Allemagne au siècle dernier....

La démocratie, c'est autre chose qu'un théâtre de Guignol à trente quatre marionnettes encombrant une scène trop petite pour elles, c'est la scène confondue avec la salle de la vraie vie, celle que les politiques contraignent, punissent et matraquent pour préserver leur sinécure, c'est l'expression publique qui va devoir retrouver sa place dans un débat libre et égal.

Et c'est encore raté pour cette fois !
Le meilleur score des communistes sera là pour éclairer le chemin de la reconquête de la démocratie.