Périple à Jean


Laissez-vous porter par le chant d'Alain, ami et grand interprète de Ferrat...








Terre de Jean FERRAT
Cet article si tôt écrit, n'est pas sitôt fini... Les mots, les lettres et les phrases vont s'y accumuler comme autant de galets  dans le lit de l'Ardèche, en bas, quand elle est sage ! Ce sera le passage obligé des soirs de tristesse, ou de grand enthousiasme ; des moments référant à Ferrat comme le grand plaisir partagé avec Alain et Macha au bord de la Glueyre, à Albon, un soir d'avril. Alain HIVER, délicieux interprête des chansons de FERRAT, son ami, auteur compositeur aussi, vient de produire une douzaine de chansons sur le thème de l'espérance qui font un bel hommage à Jean. La voix d'Alain et le chant virtuose de sa guitare sont un enchantement...
Les mots sont dérisoires qui portent l'émotion de tant de vies portées sur les mêmes pentes, tant d'utopies calées sur les mêmes portées. La Montagne...
Les paysages d'Ardèche aux milles nuances des camaïeux du printemps, les panoramas cévenols fiers et tendus comme les idées fortes, l'eau claire des ruisseaux aussi pure que l'âme commune des amis de Ferrat...
Antraigues a fière allure, couvrant son promontoire. La-haut tout se mérite, ombre ou lumière, vue intimiste des ruelles ou grandes ouvertures sur la vallée de la Volane. Antraïgain depuis 1964, Jean Ferrat y vit encore quand bien même Jean Tenenbaum y repose sous sa dalle de granit gris couvert des toutes les couleurs des fleurs...


A deux pas d'ici, quelques lacets plus bas, l'Ardèche se réjouit des eaux de la Volane; elle avait en aval entaillé tant et tant le plateau rude et vert, couvert des basaltes.


La paix est au tournant ! Mille et un petits ponts, d'un élan d'un seul, enjambent les courants et les calmes d'eau pure. La fleur et les roches, et les hommes et le ciel, tout s'y marie si bien qu'on s'imagine en dieu au travers de nos yeux, révélant à tout autre un spectacle enchanteur, reposant, merveilleux; de cette merveille rude qui n'appartient qu'aux hommes, artistes et visionnaires, comme l'était Ferrat. C'est là qu'était sa terre, et c'est là qu'il fait taire.



Ils avaient construit des murettes jusqu'au sommet de la colline...
Leur sueur généreuse nous en fait héritiers, de ces traces humaines, de ces rides de terre; et seul leur souvenir vit ici, peuplant l'ombre des grands châtaigniers, ombre et mémoires mêlées dans les nuances bleues tendres de l'éclosion printanière.

l'abeille y butine le tube pissenlit, quand la goutte en tombant dessine en rond dans l'eau l'infinie perfection des géomètres experts.


Alliance du bois et du fer dans le grand engrenage, pour qu'en cas de coup dur, l'un cède, et l'autre pas, une dent de bois à remplacer, c'est vite fait ! Le savoir-faire des maîtres des moulins nous renvoie à la vie, au temps qui nous entraine ; là aussi, de temps en temps, l'un cède, une vie se casse, et la machine grince en panne un temps avant de repartir. Une dent qui casse, une autre la remplace, et c'est le temps qui passe.



Les hommes du siècle d'après, beaucoup plus surs d'eux et de la solidité de leur oeuvre ne prenaient plus la précaution du bois, trop fragile d'ailleurs... et puis on en fabrique tant qu'on peut bien en casser à l'envie ; à peine ébréchée, changeons la roue, puisqu'il faut que la roue tourne.
De la poule ou de l'oeuf, qui donc fut le premier ? A défaut de re pondre vous saisirez le blanc de la poule sur le pré vert et le jaune éclatant dans la corolle des jonquilles.
L'entrelacs des idées tissées en branches des sapins, majestueux candélabres, est une invitation à l'évasion ; le ciel nous invite, bien au-delà des cimes, à croiser l'oiseau, à boire le nuage, à s'éblouir de l'immense soleil bleu perdu au creux de sa guitare...


La pensée sauvage... La pensée peut-elle être autre que sauvage ?

Et le bois de là-bas pleure aussi son poète.