mercredi 20 novembre 2013

Un monde poltron

Depuis quelques temps le goût du débat s'est affadi et la préférence va désormais se percher sur deux branches moins franches dans les relations d'opinion.
La première est dans la conception d'auditoires partisans taillés sur mesure et présentés comme exercice démocratique exemplaire, à plus forte raison au bistrot.
Le second tend à instrumentaliser un sujet à priori technique dont le fond idéologique est soigneusement masqué pour abuser nombre de ceux qui s'agglomèrent dans la contestation.
Deux cas récents relèvent de cette seconde pratique : les bonnets rouges anti écotaxe et l'opposition à la mise en place des nouveaux rythmes scolaires.
Concernant les saboteurs des portiques d'Ecomouv', à aucun moment on n'a entendu le moindre débat sur la perception privée de l’impôt. Quand au débat sur l'écotaxe en elle même il est passé par pertes et profits dans une démarche -de plus en plus commune- ou on fait avancer l'idée dans une structure étrangère à la représentation démocratique qui n'a plus ensuite qu'à la valider.
  • la privatisation de la perception de l'impôt ?
  • l'objet, la nature, l'assiette et le mode de perception de l'impôt ?
Dans la soupe médiatique servie matin, midi et soir, rien de tout ça... tout est occulté par le "ras-le-bol fiscal" et le régionalisme comme nouveau créneau. L'état n'a pas le droit de nous taxer parce que nous sommes bretons, fumeurs ou imbibés ! C'est le même comportement que l'individualisme collectif des tribunes de foot qui gagnent ou perdent par procuration : on a manqué de fond de jeu...
La manipulation des victimes par leurs bourreaux est d'autant plus efficace dans une société dont l'expérience du débat politique est réduite au spectacle du petit écran qu'elle est énorme.

Concernant la contestation de la réforme des rythmes scolaires, la problématique est la même et on voit une contestation périphérique concentrant des approches parcellaires et parfois antagonistes pour la réduire à sa seule dimension contestataire dissociée de motivations de fond dont l'incohérence serait fatale au mouvement. C'est ainsi que la question du financement fédère "à côté du vrai sujet".
  • la privatisation de l'action éducative ?
  • l'objet, la nature, l'assiette et le mode d'action éducative ?
La question éducative porte sur l'école de la maternelle à l'université et la formation professionnelle en fait partie, mais aussi sur l'éducation populaire au sens large. La question du désengagement de l'Etat avec des transferts de compétences aux collectivités territoriales comme le recours à des organisations associatives ou officines privées devrait faire débat, et tout particulièrement sur le modèle visé à terme. La misère faite depuis quelques années au tissu associatif historique tout en privilégiant l'émergence d'un nouveau monde associatif instrumentalisé  devrait questionner.


C'est une grille de lecture pour ce qui se passe en marge de tout ça.
La problématique des parents à l'école, loin de développer une fertilisation croisée de l'acte éducatif de la salle de classe à la salle à manger familiale, tourne le plus souvent à l'exposition de personnalités oublieuses de leur dimension représentative pour protester de leur seul cas... au point caricatural parfois d'être plus préoccupé du degré de confort du papier toilette que des projets développés par les enseignants à l'école. 
Les personnels de service encore considéré comme contribuant à la mission éducative des établissements au siècle dernier ne sont guère différents aujourd'hui des agents des prestataires privés du nettoyage ou de l'entretien d'un lieu quelconque.
Il fut aussi un temps où la restauration scolaire retenait un peu l'attention dans sa dimension éducative intégrante... Depuis que la question économique est la seule qui préoccupe les gestionnaires du système c'est sans importance de confier la nourriture des écoliers aux industriels marchands de soupe du secteur.
Le premier syndicat enseignant avait enquêté sur les inégalités entre écoles en fonction des moyens consacrés par les communes à leur école. L'écart mesuré il y a quatre ans allait de 13 à 130 € par élève (hors sorties scolaires qui constituent l'autre casse-tête des enseignants en terme de montage budget).
Évoquer les dépenses liées aux nouveaux rythmes ne sauraient occulter la réflexion nécessaire sur la situation pré-existante.
Et si en amont il était nécessaire de se poser la question de l'existence des communes dont l'essentiel des responsabilités vitales ont été transférées aux communautés de communes ou communautés d'agglomération, peut-être en viendrait-on au constat que l'affaiblissement des communes et la disparition progressive de tout ce qui en faisait la vie et l'activité va de pair avec la mort lente de l'agriculture, de la petite industrie diffuse, et de la grosse industrie concentrée en zone urbaine.
Le concept commune en vu fondre en quelques décennies tout ce qui faisait son identité, que ce soit en zone rurale ou en zone urbaine ou péri-urbaine.
Cette lente mais sure perte de sens voit son origine remonter au siècle dernier avec l'engagement d'une construction européenne exclusivement charpentée par les préoccupations financières pour corseter les peuples au prétexte de la paix.
Que les problèmes de l'école d'aujourd'hui plongent des racines jusque dans le mauvais terreau des Plans Mansholt ou Fischler peut paraître incongru ; et pourtant !
L'école communale existe-t-elle encore dès lors qu'elle devient objet de consommation où de choix concurrentiel est aujourd'hui élkargi à ses produits dérivés, TAP par exemple.

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