Pour une fois ce n'est pas le lapin qui va sortir du chapeau du magicien, mais l'électeur qui va sortir du chapeau magique de l'élu.
La réforme territoriale qui redessine les territoires va réunir les territoires de plusieurs cantons pour faire de plus grands territoires dans les campagnes et peut-être de plus petits territoires dans les villes... Le but du jeu étant d'égaliser un peu la dimension démographique des territoires cantonaux ; pourquoi pas ? ça fleure la justice... Tout en accentuant l'inégalité de leurs superficies.
Deux fois moins de cantons, mais avec le même nombre d'élus par paires mixtes sur chaque territoire cantonal, ça préserve l'élite politique du choix cornélien des éliminés d'avant premier tour. Tout au plus les élus remplaçants seraient punis s'ils devaient disparaître ; mais au vu de l'importance et du rôle qu'on leur a fait jouer, aucun séisme n'est à craindre dans le paysage politique.
Les cantons sont faits de communes, les communautés de communes sont aussi faites de communes, les circonscriptions législatives sont faites des communes faisant cantons... Les couches du feuilletage électoral ne sont guère indépendantes et l'assemblage n'a rien d'anodin quand derrière le puzzle territorial se joue la domination d'une influence politique.
Aujourd'hui le pouvoir central décide de diminuer le nombre des cantons ; demain automatiquement le périmètre des communautés de communes va changer face au nouveau découpage cantonal quand on va ressortir le même refrain qui présidait à leur conception, trop petit territoire ne saurait se suffire ! Et c'est d'autant plus vrai qu'on a pris soin d'en déménager les activités publiques ou privées pour s'assurer que la pauvreté l'asphyxie. L'union de deux misères n'assurant pas nécessairement la richesse, il est plus que probable que les les grands, gros et gras territoires urbains s'accordent pour prendre à leurs marges les miettes intéressantes des territoires perdus pour y loger leurs pauvres à l'abri des regards envieux de la réussite urbaine. La ruralité, fut-elle nouvelle, n'est jamais que la variable d'ajustement des ambitions urbaines.
Dans tous les cas de figure, tout est fait pour que les enjeux du redécoupage territorial (avec la fin des communes et des départements en ligne de mire) soient ignorés des électeurs des municipales. Ne serait-il pas intéressant malgré tout d'en savoir plus pour juger de la capacité relative à mettre en oeuvre un développement territorial juste et harmonieux des futurs élus dans tel ou tel espace territorial ? A moins qu'ils ne soient promis qu'à la gestion de cimetières devenus trop grands, auquel cas n'importe quel pilier de comptoir peut faire l'affaire.
Si l'enjeu n'était que d'assurer la désignation de tel ou tel en préparant la composition de l'électorat adéquat à la réalisation du résultat attendu, on pourrait continuer de parler de charcutage ou de cuisine électorale.
Ce qui se joue aujourd'hui va bien au-delà de la satisfaction de quelques ambitions personnelles ; c'est du remodelage des états rétrécis engagé depuis le traité de Maastricht avec la migration des pouvoirs vers des technostructures de plus en plus étrangères aux représentations démocratiques des citoyens qui est en perspective.
Les premiers frémissements d'une remise en cause de telles perspectives peuvent poindre ici ou là, de la légitimité démocratique des commissaires européens ou de celle des Agences Régionales de Santé...
C'est au souffle populaire d'entretenir cette braise et de reprendre la main en cuisine et de prendre sa place à table sans rester confiné au service de recettes qui ne sont pas les siennes.
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