vendredi 1 juillet 2011

L'eau bénite du capital

L'hebdomadaire de la France rurale ouvre un dossier "sécheresse" dans l'édition de cette semaine. Comme toujours la lecture de l'ensemble du journal est un régal pour appréhender et comprendre les problématiques de la ruralité et les ravages du capitalisme sur la terre.
Dans son dossier "sécheresse", l'article d'Olivier CHARTRAIN présente un nouveau volet du dépeçage du bien public par le pouvoir sarkoziste : la mise à l'encan des barrages hydro-électriques qui jalonne le cours de nos rivières et de nos fleuves.
La France a été pionnière en son temps dans ce domaine, installant des usines hydro-électrique pour exploiter le gros potentiel des cours d'eau du pays et produire une électricité qu'on a crue longtemps écol'eau, avant qu'on s'interroge sur les dysfonctionnements générés dans l'écosystème par ces équipements...
Toujours est-il que la principale révélation de l'article d'olivier CHARTRAIN, outre le fait du bradage annoncé de ce bien public, c'est la profitabilité des installations. L'exemple de Génissiat, sur le Rhône qui produit un chiffre d'affaire moyen de 4000 €uros par heure pour un coût de 1400 €uros : une marge bénéficiaire de 65%, ça peut exciter l'appétit des rapaces de la finances. 
D'où les projets de privatisation !


Toute ressemblance dans la démarche avec les concessions autoroutières remises au privé ne saurait être qu'accidentelles...
Et il faut certainement avoir une certaine sécheresse du coeur pour s'indigner encore qu'on donne au riches le bien commun des pauvres, pour appauvrir un peu plus les plus pauvres en enrichissant toujours plus les plus riches.


Article de La Terre à découvrir en lisant la suite...









"La concurrence assèche les barrages
Privatisation. Une cinquantaine de retenues hydro- électriques pourraient être confiées à de nouveaux opérateurs d'ici 2015. Avec le risque que Les autres fonctions des barrages en souffrent.  
 On croit que les barrages stockent de l’eau. C’est faux : derrière les voutes spectaculaires des grands ouvrages, c’est de l’or qui s’entasse. Un pactole en sommeil qui suscite bien des convoitises, à commencer par celles des grands industriels européens de l’électricité. Problème : cette eau ne sert pas seulement à la production hydroélectrique. Les barrages jouent en effet un rôle crucial pour l’agriculture, l’économie et les populations quand la France traverse, comme ces derniers mois, une grave période de sécheresse. A condition que leurs gestionnaires jouent le jeu. Ce qui pourrait changer si, comme il en a l’intention, l’Etat français ouvre à la concurrence la gestion de cinquante ouvrages d’ici 2015. En attendant plus.
PROFITS : 2 600 EUROS à l’heure
Le barrage de Gréziolles, dans les Hautes-Pyrénées, veille sur la vallée de l’Adour. La moitié des 5,5 millions de m3 d’eau de la retenue est affectée, l’été, au soutien d’étiage du fleuve côtier qui arrose une des plus grandes plaines agricole de France. Face aux précipitations insuffisantes depuis cet hiver, EDF, qui gère le barrage, a réduit la production électrique (le « turbinage ») pour permettre aux autres usages (agriculture, eau potable, industries, tourisme. . .) de passer l’été sans trop de soucis. Une perte financière pour l’industriel, qui remplit là une vraie fonction de service public. Car l’électricité hydraulique, en plus d’être très souple pour faire face aux pointes de consommation et aux incidents  sur le réseau, est aussi très profitable. Selon des chiffres publiés en avril par le magazine l’Usine nouvelle, chacune des six turbines du barrage de Genissiat (Ain), sur le Rhône, génère un chiffre d’affaires moyen de 4 000 euros par heure de production, pour un coût de 1 400 euros de l’heure. 2 600 euros de marge à l’heure ! Les barrages, tous anciens, sont largement amortis. Et même si, pour des raisons de sécurité comme de productivité, des investissements sont devenus nécessaires voire urgents [EDF a lancé en 2007 un plan de rattrapage), on comprend que les investisseurs soient avides de faire tourner à leur profit la turbine aux eaux d’or. C’est pour les servir que l’Etat a décidé d’ouvrir à la concurrence la gestion  des barrages, abritant ses intentions réelles sous le prétexte - habituel, allait- on écrire — de se conformer aux exigences de l’Union européenne en la matière. Les procédures ont pris du retard : la cinquantaine de barrages concernés, regroupés en dix « lots » (grosso-modo, dix vallées ou parties de vallées), devraient finalement voir la procédure lancée d’ici la fin de cette année, les premières attributions n’intervenant pas avant 2014 ou 2015. Il s’agit par exemple des vallées d’Ossau, du Têt et du Louron dans les Pyrénées, du Lac Mort, du Beaufortain, du Drac et de Bissorte dans les Alpes, de la Truyère et de la Dordogne dans le grand Massif central. Au total, 20 % de la capacité hydroélectrique française. Qui attire des opérateurs norvégiens (Stat-  kraft), allemand (E.O.N), italien (Enel), suisse (Alpiq)... outre les << historiques » français, EDF et GDF-Suez.
TURBINER PLUS POUR GAGNER PLUS
Les cahiers des charges sont censés préserver les différents usages de l’eau auxquels pourvoient les barrages. Mais qu’en restera-t-il face à la tentation de turbiner plus pour gagner plus ? A la fédération CGT des mines et de l’Energie (FNME-CGT), Robert Gerenton s’inquiète doublement : sur le sort que les repreneurs réserveront au personnel, avec notamment le risque (comme dans le nucléaire) d’un recours accru à la sous-traitance ; et sur «  le flou qui règne sur la question de Ia revente de l’électricité ». De fait, rien ne dit qu’un opérateur  comme E.O.N, confronté à la demande d’électricité en Allemagne suite à l’arrêt du nucléaire, ne sera pas tenté de réexporter outre-Rhin une partie de sa production hydraulique française. De toute façon la production d’électricité risque de prendre le pas sur les autres fonctions des barrages : rappelons qu’en France même, le Grenelle de l’environnement prévoit 10 % d’électricité d’origine hydraulique en plus. Le risque est grand, note encore Robert Gerenton, «  que chaque usage ne soit pris en considération que sur des bases financières ». Autrement dit qu’agriculteurs, collectivités locales et industriels doivent payer pour une gestion des retenues aujourd’hui assurée au titre du service public."
Olivier Chartrain 

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