lundi 23 septembre 2013

Modernitude

Les jours passent et l'échéance approche... L'élection municipale se profile pour le printemps prochain, et c'est déjà demain !
A voir et entendre le murmure de la rumeur, à observer les démangeaisons des uns quand les autres se grattent, on peut être assuré que la mise en scène de la prochaine "saison" -comme ils disent des séries télévisées- est sur le feu. Le temps du casting est venu, ça commence par les têtes d'affiche, et ça se poursuivra avec les seconds rôles. Quant aux figurants, ils peuvent toujours espérer jusqu'au jour du scrutin, ou presque, car cette année le législateur exige une déclaration de candidature préalable en préfecture, ce qui évitera la déconvenue de quelque tricheur en situation d'inéligibilité.
Sur le fond, le mal est déjà fort répandu, une forme insidieuse de schizophrénie, dédoublement pathologique de la personnalité politique locale qui va jurant des grands dieux qu'au niveau municipal "on ne fait pas de politique", et qui, sous l'or des salons de la préfecture s'empresse de choisir son sénateur ou sa sénatrice... pas politique pour deux sous l'élection sénatoriale !
De la même façon, comme il est assez inconcevable d'être candidat à une élection quelconque sans être déjà titulaire d'un autre mandat il est de bon ton de fustiger les "cumulards" et de prôner pour les autres la vertu qui n'est pas la sienne...
Les déchirures musculaires consécutives au grand écart familier des adeptes de la langue de bois politicienne, du "faites ce que je dis, pas ce que je fais", ne vont pas manquer, ne serait-ce que pour promettre aux électeurs dont les voix sont tant convoitées qu'on les écoute...

Et c'est bien là le problème majeur des politiques d'aujourd'hui, une incapacité flagrante à produire un discours qui dépasse le comptoir de bistrot ou l'étal du marché, une dérive démagogique prompte à alimenter toutes les peurs, toutes les inquiétudes de la sphère intime des personnes à l'humanité toute entière.
"... Pensez-donc, ma pauvre dame, avec tout ce qu'on voit aujourd'hui... Pas étonnant que Le Pen progresse !"


Cette dérive ne doit rien au hasard, ni à une quelconque prédestination des consciences à conduire à droite, à déraper sur l'accotement avec la république policière de Valls ou de verser dans le fossé nauséabond de l’extrême droite avec Fillon.
Le grand virage idéologique pris depuis quelques décennies est bien celui de la soumission aux "lois du marché", aux appétits capitalistes et aux injonctions des profiteurs. Cette évolution dépassant largement la durée de vie d'un mandat parlementaire ou d'une position gouvernementale a été très fortement accentuée sous la droite au pouvoir ; mais loin d'être contrecarrée quand la gauche reprend la main, au niveau local comme au niveau national, point de réorientation ni de changement de cap : tout au plus quelques ajustements à la marge pour rendre moins insupportable la douleur sociale et promettre au retour de la droite un chantier à reprendre en bon état de conservation.
Le chantier des retraites est bien malheureusement emblématique de cette ruine démocratique ; mais tous les autres grands domaines régaliens fournissent leur lot de tristes exemples, l'école, la justice et la sécurité, la santé, les transports...

Alors, face à ce spectacle dont certains s'étonnent qu'il démobilise les électeurs, et plus particulièrement à gauche pour les jeter dans bras de l’extrême droite ou dans l'abstention, les affirmations selon lesquelles "l'action municipale, avec les luttes et l'engagement militant, serait un point d'appui essentiel qui peut servir au dépassement du capitalisme", resteront paroles verbales tant que les pratiques observées ne feront pas de la démocratie et de l'engagement des citoyens le moyen de résister et de construire...
Peut-être serait-il utile et profitable, ne serait-ce que pour les communistes, de se poser, les pieds sur terre, et d'évaluer les effets des orientations chaotiques des trente dernières années pour ne viser que la période où l'attente à gauche a connu l'espoir. La constante, louable et juste,  a toujours été la logique du rassemblement. Ce fut aussi et toujours la pierre d'achoppement dès lors que le rassemblement pose toujours la question des limites et du périmètre de l'agglomération des différences. La difficulté réside aussi dans l'affichage de la composition de l'assemblage. Dans la dernière expérience en date avec le "Front de Gauche", passé l'épisode et le programme des présidentielles, la difficulté reste grande à déterminer ce qui fait partie commune et ce qui fait la différence, ce qui relève de la tactique partisane de quelques groupuscules accrochés à l'audience et aux moyens du PCF et ce qui fonderait une véritable stratégie de reconquête du pouvoir véritablement à gauche... Au fil des années le fossé n'a jamais cessé de s'élargir entre la priorité "alimentaire" de composer avec des modérés toujours plus modérés pour tenter de conserver des positions électives au détriment d'une autre nécessité réservée aux slogans et affiches exprimant les attentes populaires sitôt remisée à l'issue des scrutins.
Et, pour la préparation des municipales, afficher l'ambition du travail au cas par cas, selon les réalités du terrain c'est bien renoncer à changer les choses en offrant des perspectives politiques claires. Le renard des ambitions se voit livrer les clés du poulailler.

"il faut exister médiatiquement... il faut des élus pour faire parler du parti..."

Quand le degré zéro du politique est atteint, creuse encore !

Aujourd'hui les "médias" ne sont qu'un outil parmi d'autres de la domination capitaliste du monde et des peuples. Leur usage au service d'un parti qui se voudrait révolutionnaire ne passe pas par des "figures emblématiques" qui vont faire le "buzz", mais par des idées partagées inspirant l'action ; les hommes sont "contournables", les idées le sont moins dans l'espace comme dans le temps. La lecture des philosophes des Lumières, des acteurs des révolutions du XIXème siècle, des précurseurs du début du XXème, et d'autres aujourd'hui serait des plus utiles à celles et ceux qui conjuguent leur bruit au présent.

Pour ce qui est de l'existence, si tant est que ce soit un objectif en soi, ce n'est pas un maquillage médiatique complaisant qui la fait durablement, mais plus sûrement ce qu'on est capable de savoir et de faire, de savoir-faire, parfois de savoir faire faire ou de faire savoir... pour construire quelle réalité demain plus belle que notre idéal d'aujourd'hui...

Quant à la nécessité de faire parler du parti avec les élus, c'est s'imaginer que les chevaux de bois du manège vont faire le concours hippique. Pour les partis comme pour leurs élus, la relation au peuple est aujourd'hui détériorée. Crise de confiance disent les uns, déficit démocratique disent les autres... Et tous les moyens utilisés empirant le mal (financement des partis, fonctionnement des élites élues...), la solution est à chercher ailleurs que dans le cache-misère d'un affichage médiatique. 

La situation-problème dans la crise de la démocratie représentative s'est manifestée depuis quelques années par tentatives de traitement par "patchs".
Les uns imaginent des pratiques dites de "démocratie citoyenne ou active ou participative...".
Les autres inventent des "primaires", élections pré-électorales, histoire de faire croire que la désignation du candidat échappe à la jouissance de l'auto proclamation ou au blessures de la concurrence exacerbée.

Dans tous les cas l'organisation politique n'est plus aujourd'hui que l'instrument de quelques ambitions, alors que par nature c'était le plus sûr chemin de l'élu au peuple, celui qui fait la différence entre le partisan et l'opposant, celui qui fourbit les idées quand il les partage comme quand il les affûte en se frottant à l'adversité.

Il est toujours temps de repenser la relation triangulaire dont l'équilibre garantit la démocratie entre un peuple de citoyens, des organisations politiques et les élus qui en sont issus pour outiller et garantir l'exercice collectif des droits. C'est bien de la reconquête de la démocratie que notre pays a besoin ; comme beaucoup d'autres d'ailleurs !

"penser le changement" ou "changer le pansement", à chacun son possible.

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