dimanche 3 mars 2013

De fil en aiguille

Grosse révolution pour les prochaines municipales, en particulier dans les départements ruraux comme le nôtre. Le scrutin de liste serait imposé dans toutes les communes de plus de 500 habitants, contre 3500 auparavant... Plus de panachage, et des résultats au pourcentage obtenus par les listes.
Le risque est grand, rendez-vous compte, que les élections municipales soient "politisées" !
Et là, ce sont toutes les sensibilités politiques qui se retrouvent pour grincher, grogner, gronder contre une telle ânerie, y compris des élus socialistes... 
C'est que les grandes envolées sur la citoyenneté, sur la démocratie participative et la démocratie tout court, le mérite universel de la proportionnelle... tout ça ne saurait venir déranger les petits arrangements des rentiers de la démocratie locale qui "ne font pas de politique" ! 
Bin voyons, de temps en temps ils élisent des sénateurs, et on ne choisit bien les conseillers généraux ou régionaux que parmi ceux qui ont l'expérience et l'aubaine d'un mandat municipal... Quant aux parlementaires, n'en parlons pas ! Eux parlementent beaucoup de l'arlésienne du "non-cumul des mandats" en justifiant leur statu-quo à chaque point-virgule. 

Quelle logique universelle imposerait que les élus des communautés de communes ou d'agglomération doivent être élus des conseils municipaux ? Si ce n'était pas le cas, la grande crainte de la disparition des communes s'éloignerait peut-être avec des élus municipaux un peu moins disposés à la concession de leurs "compétences" aux regroupements de communes qui ne leur laissent guère aujourd'hui que la gestion des cimetières. La logique de coopération prévaudrait plus souvent à celle de la dévolution et le dialogue démocratique pourrait s'imposer entre les deux niveaux de collectivités. Politiquement les choses seraient aussi plus justes en évitant de réserver à la droite la direction des intercommunalités par le biais des élus dits "sans étiquette" des petites municipalité qui font le plus souvent les majorités intercommunales.
L'argument décisif des opposants à cette réforme comme à celle de l'élection des conseillers généraux porte sur la "proximité des élus" de leurs mandants. Belle baliverne ! sauf si et seulement si la proximité dont il est question porte sur la fréquentation des bistrots aux comptoirs desquels s'élaborent les grands projets politiques dans la transparence des verres vides.
Alors, que le mode de scrutin puisse remettre un peu de politique et de cohérence dans les équipes municipales, que les minorités soient représentées et que les listes soient plus construites sur la base des projets à soutenir et mettre en oeuvre que sur la conservation de l'indemnité du pouvoir, la démocratie locale a tout à y gagner.
Elire des gens qu'on connait ? ... dont on connait les qualités ? Quelles qualités devraient fonder le choix des candidatures ? Elles sont nombreuses et sans hiérarchie aucune. L'envie de servir qui n'a rien à voir avec l'ambition, un savoir-faire utile à la collectivité, une ouverture et une capacité d'agir et dialoguer avec les autres mondes institutionnels ou privés sur des orientations politiques claires, revendiquées et reconnues... La qualité primordiale relève certainement de l'honnêteté, celle qui préside au comportement de celles et ceux qui font l'effort de se bien conduire avant de prétendre à la conduite de la chose publique...
La capacité à s'exposer n'est pas non plus négligeable ; mais c'est bien celle de s'exposer aux coups et à l'adversité, pas celle du "se faire voir" !
"Dans les petites communes où les gens se connaissent, les électeurs aimaient se déterminer à partir de la qualité des personnes. On enlève du pouvoir aux citoyens et on éloigne les élus du terrain. "
Ce propos attribué à un député socialiste tourne en boucle chez beaucoup d'élus ruraux.
Peut-on vraiment en toute cohérence, se plaindre de la dépolitisation d'un peuple de citoyens détournés du choix des urnes autour du slogan "tous les mêmes" et réclamer des élections locales  échappant aux choix politiques ? Comme si se prononcer sur "la qualité des personnes" exonérait de la définition de cette prétendue qualité. Celle qui ressort évidemment va définir l'insignifiance la plus patente, sur celle qui plait au plus grand nombre, ou sur celui qui ne dit non à personne... des gens "bien comme il faut" soit-disant susceptibles de ne froisser personne et de mobiliser largement autour d'eux en désamorçant les tentatives adverses... La méthode sarkozy de l'ouverture en quelque sorte.
Il y a mieux dans le domaine démocratique et la sauvegarde de la base démocratique des collectivités locales mérite autre chose que ces gesticulations d'élus.
Ce serait une grande chance pour la démocratie locale que les élections locales soient effectivement repolitisées et ça n'éloignerait pas nécessairement les élus du terrain... de foot !
Mais chaque chose a sa place, le parti politique n'est pas le comité des fêtes, l'un animera d'autant mieux les festivité locales que l'autre y développera la vie.
Sans compter que "Dans les petites communes où les gens se connaissent...", les gens se connaissent de moins en moins, parce que la vie et le travail ailleurs les séparent, parce que la population traditionnelle des gens vivant et travaillant ensemble ou côte-à-côte n'est plus la réalité d'aujourd'hui... parce qu'il faut même en venir au subterfuge des fêtes des voisins pour réintroduire le gène du "vivre ensemble" dans une ruralité de secours pour les plus fragiles désertée par les services et la diversité sociale qu'ils portaient...
Le changement, c'est pour quand ? Certainement pas pour demain si la priorité démocratique tourne autour du redécoupage des cantons dont le nombre serait divisé par deux... Plus vicieux tu meurs ! Les socialistes bricolent ici la machine à stériliser la vie politique locale entre PS et UMP avec à la marge tous les petits arrangements politiciens permettant aux autres forces politiques de conserver quelques personnalités élues, des plus consensuelles et compatibles avec l'alternance tranquille. Avec le titulaire du ministère de l'intérieur qu'on connait, un département comme l'Allier risque de pâlir subitement avec un redécoupage du style de celui qui avait présidé à la création de la troisième circonscription législative qui barrait le département de Gannat à Cérilly pour y parquer l'électorat communiste en préservant les trois villes de sa redoutable contamination. A moins que ne soit promue une pratique des alliances hétéro-partidaires préservant la diversité des orientations politiques dans la représentation des grands cantons...
Le chemin susceptible de ramener les citoyens aux urnes ne passe surement pas par là !
La parité femmes-hommes imposée par la loi devrait-elle présager d'autres quotas institutionnalisés des "minorités visibles" dont il est juste de revendiquer la reconnaissance ? La diversité en politique n'a-t-elle pas plus aujourd'hui à se préoccuper de sa différenciation idéologique que de ses quotas de représentation ?

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