samedi 23 mars 2013

A hue et à dia

Avec le troisième congrès du Parti de Gauche réuni à Bordeaux, Jean Luc Mélenchon marque sa différence. Adepte d'un discours sans concession au pouvoir socialiste, le tribun tant vanté des présidentielle en vient aujourd'hui à agacer au sein même du Front de Gauche.
Le questionnement sur l'euro, le projet de société écosocialiste, la stratégie de listes "front de gauche" pour les municipales... Le Parti de Gauche multiplie les petits cailloux dans le sabot communiste.
Les déclaration d'André Chassaigne il y a quelques jours, celles de Marie Pierre Vieu hier, nombre de prises de position soulignent des différences d'appréciation qui deviennent ostensiblement des divergences d'orientation.
Lorsque, parmi les communistes, cette hypothèse d'évolution était évoquée, les laudateurs béats du Front de Gauche s'offusquaient de la ringardise des sceptiques, de leur manque de clairvoyance et d'ambition pour la gauche...
Aujourd'hui, on a tous le nez dedans ! Alors on en pense quoi de la "différence qui fait la richesse..." ? 
Et les formules de Delapierre reprises par Jean-Luc Mélenchon à propos des "17 salopards" ? On en dit quoi ? 

L'exigence d'une ligne idéologique claire  et constante n'est pourtant pas si difficile à assumer, dès lors que les idées valent plus que les positions ou les mandats.
L'expérience montre assez que l'exercice du pouvoir ne renforce en rien les idées dès lors qu'il est contraint par l'affadissement des alliances et la subordination au pouvoir encadrant, d'autant plus que nous sommes désormais dans un format présidentiel de notre République et que seule l'orientation présidentielle encadre l'action politique. Les seules amodiations possibles le sont à la marge et loin du pouvoir central quand une municipalité décide de la gratuité pour les usagers des transports urbains ou quand elle organise une restauration scolaire autonome avec approvisionnement bio en circuit court.
Alors, la posture de Mélenchon sur le "pouvoir de rechange" rompt avec les concessions à la carte ici ou là qui sont pronées par la direction du Parti Communiste pour préserver les alliances électorales mutuellement profitables au PS et au PC.
La question est bien fondamentale aujourd'hui de savoir si on continue à faire le pâté d'alouette avec un cheval socialiste et un moineau communiste ou si comme le préconise Mélenchon, on part dans la reconquête de l'opinion de gauche avec un Front de Gauche affranchi des pesanteurs sociales libérales du PS.
Cette alternative n'écarte en rien la nécessité d'une construction pluri orientée de la gauche d'avenir dont le pays a besoin et qui fasse échapper à l'alternance dévastatrice PS-UMP qui fait que le PS parachève la sale besogne de la droite (cf. MAP après RGPP). Mais c'est bien de stratégie qu'il s'agit et pas de tactique politicienne au cas par cas.
 Le Front de Gauche n'est pas un mauvais outil à la condition de s'en servir tous convenablement et dans le même sens. On ne peut pas raisonnablement s'en servir d'une façon quand ça arrange (européennes, présidentielles) et autrement quand ça dérange (cantonales ou municipales).
Le risque est grand de voir se développer le plus grand désordre à l'approche des élections municipales  qui nous replongerait dans la cacophonie des élections régionales ou la "richesse de la diversité" s'affichait surtout en "chacun pour soi" à géométrie variable selon la sensibilité des élus et des candidats locaux. La subordination des partis "traditionnels" à leurs élus ne fait qu'accroître ce risque aujourd'hui.
Dans une telle configuration il ne faut pas attendre le sursaut citoyen qui ferait reculer significativement l'abstention et redonnerait au peuple la conduite de sa destinée. C'est bien de projets clairs et construits dont les gens ont besoin aujourd'hui pour éviter qu'ils se jettent dans les bras de n'importe quel prêcheur de foire.
Les communistes ont besoin d'être communiste avant, le cas échéant, d'être utiles au "Front de Gauche"; et c'est d'autant plus vrai que désormais, Jean-Luc Mélenchon abandonne l'idée d'en faire le parti regroupant toutes les tendances à la gauche du PS et qu'il déclare son Parti de Gauche "famille d'accueil" des déçus du Parti Socialiste.
Pour jouer son rôle naturel de rassembleur c'est le Parti Communiste qui aurait dû se mettre en configuration de "famille d'accueil" depuis trois décennies cette année ! Et la famille d'accueil n'est pas l'auberge espagnole, elle se doit d'offrir un cadre établi et sécurisant, valorisant son existence pour mieux s'ouvrir aux autres. 
A gauche aujourd'hui comme hier les courants réformistes et révolutionnaires sont nécessairement concurrents. La coopération ne s'organise qu'à l'intérieur de ces deux obédiences pour en assurer l'hégémonie ou tenter sa reconquête. Les alliances intermédiaires ne sont que conjoncturelles et ne préfigurent en rien la construction d'une gauche durable débarrassée de sa gangue libérale.
La gauche d'avenir à construire couvrira bien le large éventail de la gauche de la gauche aux socialistes, encore faut-il donner du corps à son centre de gravité ; et c'est la vocation des communistes.


Mulets et bardots auront toujours un chromosome de moins que les chevaux et un de plus que les ânes dont ils sont issus ; ça ne remet pas en cause leur utilité, mais ils sont généralement stériles.

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