L’humanité du 1er septembre consacre une double page à un entretien avec Pierre Laurent à l’occasion de la sortie de son livre “Le nouveau pari communiste”.
Aussi bien le titre choisi que la teneur d’une partie de l’entretien ont attiré mon attention.
Le “pari” communiste, tout d’abord ; Jouer sur les mots a toujours été intéressant pour capter l’attention de l’auditoire ou des lecteurs, c’est du décalage entre l’attendu et la perception qui fait qu’on peut concevoir autre chose que ce qu’on est en capacité d’imaginer. Dans le cas d’espèce le mot “pari” n’a rien d’anodin; outre le fait qu’il peut se lire “parti” sous la signature du secrétaire national du Parti Communiste Français, il fait bien référence au jeu. Or si la politique a ses enjeux, le jeu, lui est politicien. Parier c’est bien gager son propre bien que celui à qui l’avenir donnera raison remportera. La mise est connue, c’est le parti communiste français qui est gagé et engagé. Quel serait donc l’enjeu ? La sortie démocratique du cauchemar sarkozyste en est un ; la prévalence du choix des électeurs pour le Front de gauche avec Mélenchon en est un autre. Une gauche majoritairement hostile aux pansements socio-démocrates sur les plaies de la crise peut s’inscrire dans ces pronostics du pari. Le pari est aussi lancé comme précurseur de surprise, avec un choix d’options susceptible de déjouer les pronostics des observateurs comme des concurrents ou des adversaires. Dans tous les cas le jeu cache l’enjeu, il renvoie à une hypothèse de gain dans le futur en s’exonérant de toute activité dans le processus de changement. En démocratie politique le chemin à parcourir entre aujourd’hui et demain pour gagner le changement n’est pas l’objet d’une mise ou d’un gage, c’est un lent et long travail de conviction qui fasse germer et grandir dans les consciences leur propre capacité à générer le changement, à le porter à la fois dans les urnes mais aussi dans l’action militante au quotidien. Aujourd’hui les socialistes jouent. Leurs primaires sont dans l’ordre du jeu théâtral celui-là avec pour premier objectif d’occuper la scène médiatique en proposant aux citoyens d’assurer leur casting présidentiel. Côté cour Emmanuel Valls tient bon avec des options qui le feraient ministrable d’un Sarkozy 2. Côté jardin, à gauche, il n’y a pas grand monde. Entre premiers rôles et faire-valoir cette comédie burlesque ne grandit pas la démocratie tant elle reste dans l’ordre du jeu politicien.
Le pari sur Mélenchon arraché aux forceps aux communistes n’est bien qu’un jeu du même ordre. La direction nationale du PCF a mis le parti sur la table ; qui remportera la mise ?
Le second point intéressant est le “nouveau pari”. Cela fait des années que l’idée de rénovation est présente aux marges de l’organisation qui s’est déjà beaucoup réformée (déformée) au fil de ses congrès. Là notre secrétaire national se pose en novateur promoteur d’un “nouveau parti communiste”, consacrant ainsi les dérives de la dernière décennie qui ont écroulé dans le même élan le nombre des adhérents et celui des électeurs.Il est certain que les amputations successives des deux dernières échéances présidentielles ne peuvent que dessiner l’image d’un parti nouveau dont la convalescence s’opèrerait au bras de Mélenchon.
Le nouveau pari suppose que le parti en aurait fait d’autres qu’il aurait perdu. S’agit-il de la “mutation communiste” de Robert Hue ? … des collectifs anti libéraux avec Clémentine Autain et Marie-George Buffet ? … de Gayssot à l’appui de Frèche ? etc.
Le programme commun de la gauche, un échec pour autant, ne relevait pas du jeu mais bien de l’action politique au niveau des états-majors.
Un pari de plus donc… à gagner peut-être ! Pourquoi pas ?
Dans sa présentation, cette démarche n’est pas sans me rappeler celle des pauvres bougres qui sont au 36ème dessous et qui viennent au bureau de tabac verser leur offrande à la “Française des jeux” pour qu’elle exauce leur vœu de fortune. Las, ils s’en retournent généralement encore un peu plus désargentés qu’ils n’étaient arrivés.
Le second point qui m’a particulièrement intéressé porte sur l’organisation elle même du Parti Communiste Français.
“… notre objectif est de refaire du PCF, non pas une force nationale qui compte, il l’est déjà, mais une force politique de premier plan. Un des atouts du PCF est l’afflux, depuis 2005, de nouvelles générations qui constituent une force militante extrêmement active mais qui a encore insuffisamment les commandes.”
Le propos ne manque pas d’ambigüité ; s’il s’agit de nouvelles générations d’adhérents qui auraient grossi les rangs des effectifs du PCF ça se verrait et ça se saurait. Je ne suis pas convaincu qu’en annonçant la désignation de Mélenchon candidat aux présidentielles par 48631 adhérents à jour de leurs cotisations on puisse valider cette option.
S’il s’agit dans l’espace citoyen de l’émergence de nouvelles formes d’engagement politique, les signes précurseurs existent effectivement, la plupart du temps empreints d’une méfiance vis-à-vis des partis politique “traditionnels” qui confine au dégout. Si ces manifestations diverses et variées d’attentes et d’espoirs se sont affranchies des structures existantes, de la même façon qu’une multitude de morceaux ont proclamé leur indépendance, c’est bien que le modèle consacré à la seule préoccupation électorale ne tient pas ses promesses.
Groupuscules ou comités, parti de gauche parti du parti socialiste, gauche unitaire partie du NPA, NEP et MUP de Robert Hue partis du Parti Communiste Français… La démocratie politique s’accommode assez mal d’une société faite de chapelles, grandes ou petites dont l’unique objet est de nourrir son prêcheur.
Dans un grand élan de générosité et d’ouverture va-t-il falloir “confier les commandes” du Parti Communiste Français à de “nouvelles forces militantes extrêmement active”… depuis 2005, mais qui auraient omis de contribuer aussi bien financièrement que de leur force militante à l’enraiement du déclin du PCF. A moins que le pari soit là.
Les dirigeants du parti communistes, pas plus que ses adhérents d’ailleurs, ne sont propriétaires de leur parti. Il devraient plutôt s’en considérer comme d’heureux locataires dont les cotisations valent loyer et charges, et qui sont en devoir de bien entretenir leurs parties communes.
A l’état larvaire sous Robert HUE, et après sa métamorphose engagée avec Marie George BUFFET, de chrysalide en papillon, le PCF se débarrasse de sa mue avec Pierre LAURENT qui dessine un nouvel imago communiste.
Ces turbulences font l’économie de trois clarifications pourtant bien indispensables à la détermination citoyenne :
- Qu’est-ce que la démocratie ?
- qu’est-ce que la gauche ?
- Qu’est-ce que le communisme ?
A moins que je jeu politicien suffise au bonheur des “hommes politiques” , auquel cas, les citoyens continueront de s’abstenir, tant ils se sentent “hors-jeu”.
“Faites vos jeux ! rien ne va plus !”
Effectivement, rien ne va plus ! et les tricheurs sont aux manettes.
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