samedi 6 décembre 2014

A vendre, démocratie, mauvais état mais peu servie.

L'hiver n'est pas encore là, mais des frissons parcourent l'échine des républicains attachés au bien public quand les actus défilent.
Imaginez-vous au réveil d'un coma prolongé de trois années...
... et le transistor égrène les infos du jour : "un consortium chinois rentre au capital de l'aéroport de Toulouse Blagnac..."
Au infirmières qui s'enquièrent des sensations du réveillé, celui-ci pourrait répondre sans broncher que rien n'a changé. Sarkozy avait bien privatisé les autoroutes, alors pourquoi pas les aéroports en attendant de privatiser l'air rare et glacial en altitude des routes des avions,..
Sauf que, bafouillent les soignantes inquiètes de la réaction du cœur du patient à la révélation :
"mais monsieur, la gauche est au pouvoir, depuis deux ans et demi le changement c'est maintenant, et c'est le jeune Macron qui vient de diligenter la privatisation de Toulouse Blagnac !"
Hésitant un instant avant de replonger dans le confort de l'inconscience le patient leur livra quand même son diagnostic et dicta rapidement l'ordonnance du traitement.
La situation est grave, notre pouvoir a été victime d'un AVC et la paralysie totale de sa gauche nécessite une opération électorale d'envergure pour évacuer le caillot libéral qui exerce une pression invalidante sur toutes ses fonctions progressistes... à placer dès maintenant sous manifestations intensives et surveillance populaire de tous les instants pour conjurer le risque d'une nouvelle hémorragie d'électeurs abstentionnistes à gauche qui laissent le champ libre et l'illusion du progrès au virus brun de l'extrême droite...
Et là-dessus le citoyen patient se rendormit calmement sous l'effet lénifiant de sa perf de démocratie participative ;  en attendant la sixième République, il peut dormir tranquille, ses grands élus se chargent de tout.

Quand la fable se perd dans l'excès c'est généralement qu'elle colle au plus près à la réalité. Pour s'en convaincre et vérifier que la dérive libérale ne frappe pas que les hautes sphères réformistes de la social-démocratie il suffira d'observer l'usage de l'argent public dans les collectivités territoriales jusque dans les plus petites. Le recul de l'Etat protecteur des citoyens les plus faibles et seul en capacité de fournir les services publics d'envergure (éducation, santé, énergie, communication...) ne fait aucun doute, il doit tant aux banquiers et à la guerre qu'il ne reste plus guère pour la vie, la paix et les citoyens. Du coup les collectivités territoriales se plaignent à juste titre de leur délaissement avec des missions désormais baptisées "compétences" sans moyens... Pensez donc à ces pauvres petites communes qui n'en peuvent plus pour entretenir un patrimoine bâti en progression constante pour loger à bon marché les activités des commerçants ou des artisans, et des professions libérales ou des services de l'Etat... Sans compter que l'école leur coûte désormais énormément cher avec la municipalisation des heures récupérées des coupes sarkosistes (au passage ce n'est pas la dépense communale qui est problématique mais plutôt le fait qu'on cède une part de la responsabilité de l'Etat pour des activités dites "éducatives" et du personnel à bon marché dans le plus grand désordre).

Pourquoi pas vendre en concession un bout de route nationale à une société d'autoroute ?
On a bien concédé à des sociétés privées la sécurité avec les sociétés de gardiennage, le reclassement des demandeurs d'emploi pour soi-disant faire mieux que l'ANPE ou maintenant Pôle Emploi à des société privées de "formation" qui font plus de profits que de résultat...
Les écoutes téléphoniques dans le processus judiciaire sont assurées par des société privées... La police de la vitesse sur les routes avec les radars est aussi branchée sur le privé... L'écotaxe et ses fameux portiques auxquels on va certainement accrocher des balançoires aussi... 
Pas étonnant que le Medef ait à Matignon un premier ministre qui "aime l'entreprise" !
Et l'entreprise privée peut bien rendre service au public, à défaut de Service Public, l'argent public a le goût du profit. 

Jadis, bien avant que nos brillants édiles d'aujourd'hui aient mouillé leur première couche, les communes ayant la charge de leur école logeaient les instituteurs dans des logement dits "de fonction", parce qu'ils en avaient une, fonction !, N'avait-on pas trop de considération pour ceux -là pour en arriver à une situation où la gloire est plus surement assise sur le fric que sur les valeurs républicaine, plus souvent sur la légèreté affriolante que sur les compétences ?

La chasse aux privilèges des fonctionnaires, avant que s'ouvre la chasse au  fonctionnaires tout court est venue à bout de ces pratiques déraisonnables. Il est bien plus juste aujourd'hui de dispenser l'argent public au profit des intérêts particuliers des activités privées et libérales. 

Dans les campagnes depuis déjà longtemps, et aujourd'hui dans les villes, la pénurie organisée des professionnels de santé des ordres libéraux a conduit à ajouter à leur rémunération sur la dépense publique qui doit garantir l'égal accès de tous aux services de soins la fourniture du gite et du couvert... 
Les Restos du cœur et le Téléthon ont encore de beaux jours devant eux tant que la puissance publique brade les bijoux de famille pour assurer ses fins de mois, satisfait à l'appétit sans limite des racketteurs de la finance ou arrose à fonds perdus les jardins particuliers...

Qu'on ne s'y trompe pas, la gauche progressiste n'est pas calée sur le discours nostalgique du "c'était quand même mieux dans l'temps !". Ce discours-là a toujours été celui de la droite et de la plus réactionnaire (à vérifier dans tous les débats sociétaux des dernières décennies : abolition de la peine de mort, droit à l'interruption volontaire de grossesse, égalité hommes-femmes, mariage pour tous...); mais pour autant la conduite à gauche n'est jamais sure sans rétroviseurs, ne serait-ce que pour vérifier qu'on n'a pas enclenché la marche arrière !


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