vendredi 15 février 2013

Réinventez l'eau froide

Aujourd'hui à la Sorbonne on peut vraisemblablement réussir des études, y compris en master 2 "Ingénierie de la concertation"... les prémices du réapprentissage de la démocratie, dans sa version revisitée par les nouveaux savants en la matière : une démocratie dans laquelle les gens peuvent donner leur avis ! ... prochaine étape, après les avoir réhabitués à concevoir et dire leur opinion, à commencer les pratiques d'échange et de débat, on pourra imaginer un système par lequel on pourrait mesurer les rapports de force entre les courants d'opinion ; en mettant un petit bout de papier dans une boîte on ramasserait l'avis de tout le monde, on compterait et on dirait le résultat. Si tout le monde était d'accord on pourrait appeler ça une "élection"... Nombreux, trop nombreux sont celles et ceux qui s'abstiennent d'y participer aujourd'hui ; et de ce fait les élus s'activent à trouver des subterfuges pour activer la démocratie amputée qui les a faits. Les uns la veulent citoyenne, les autres active ou participative... 
Les "laboratoires d'idées" si prisés des politiques d'aujourd'hui sont bien aux antipodes de la reconquête citoyenne et populaire de la République. Et le projet "Parlement et citoyens" n'en serait qu'un cache-misère illusoire.
Sous le titre "Le FN prend en otage la démocratie participative" Grégory Marin signe à ce sujet un article dans l'Humanité daté du 14 février à propos du lancement de ce site qui prétend donner la parole aux citoyens dans un projet de démocratie participative baptisé "Parlement et citoyens". 

Ce projet issu du consensus dans le paysage des "think tanks" de l’extrême droite à la gauche a suscité le retrait du PCF et de la fondation Gabriel Péri, d'accord sur le fond, mais non dans la forme qui valide la présence du Front National dans le paysage politique.
De fait le fond est aussi pernicieux que la forme, et sa dimension dévastatrice pour la démocratie mérité d'être décortiquée.
Tout d'abord ce projet est issu d'une logique de communication d'influence, de lobbying qui est consubstantiel des think tanks, de droite comme de gauche. Ce phénomène participe de l'effacement des partis politiques au profits de rassemblements moins formels et plus opportunistes construits dans le meilleurs des cas sur une échéance électorale sinon pour servir une cause particulière en un temps donné. Pour ces organisations point n'est besoin de militants, un petite équipes de gourou et une armée d'adeptes obéissants  suffisent. Ces corps intermédiaires s'exonèrent des responsabilités du pouvoir dont ils suscitent les orientations en coulisses.
Le fait d'ouvrir la participation au citoyen lambda avec le support d'Internet est techniquement facile. Mais l'addition d'avis individuels d'internautes ne fait pas une politique ; des propositions d'apparence voisines peuvent recouvrir des intentions diamétralement opposées et l'exemple des pratiques d'André Chassaigne n'y changent rien. La démocratie dite participative n'est qu'un leurre pour masquer les pratiques trop peu démocratiques des élus en quête de compensation et de justification.
La première des démocraties participatives est bien celle qui fait voter les citoyens à l'issu de débats qui ont vu les partis politiques développer leur argumentaire et confronter leurs options. L'abstention est le premier signe de sa faiblesse de la démocratie ne sera pas durablement combattue par de simples subterfuges à l'initiatives des élus.
Contrairement à l'option choisie par Lucien SEVE dans sa critique rénovatrice du PCF, je reste convaincu que l'avenir de la démocratie politique passe par des partis politiques réhabilités plutôt que liquidés et remplacés par des structures nouvelles et plus ou moins formelles.
Le hiatus signalé dans l'article consacré au site Parlement et citoyens ne fait que justifier encore un peu plus cette option.

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