jeudi 25 octobre 2012

TGV, Bercy bien !

Les médias locaux n'ont pas manqué de se faire l'écho du mécontentement des clients du rail depuis que les auvergnats sont relégués à leur arrivée à Paris en gare de Bercy plutôt qu'en gare de Lyon.
Il fallait certainement faire de la place en gare de Lyon pour plus de TGV, nobles engins regardant de haut les tortillards rebadigeonnés de chez nous.
Et donc terminus auvergnat à Bercy, juste un peu à l'écart et sans galeries ni verrières, ni boutiques à foison, ni foule fourmilière... Juste une gare, quoi !
Il y a là de quoi vitupérer contre le mépris capital qui substitue aux escaliers mécaniques ou pas et au dédale des couloirs du métro... un escalier sur le parvis, mécanique ou pas, et un ascenseur avant deux ou trois cents mètres de trottoirs qui conduisent au premier métro.
Certes la première bouche est interdite aux voyageurs provinciaux à tickets ordinaires, mais lignes 6 ou 14 ne sont pas si mal pratiques pour pénétrer la ville ! et l'air des trottoirs et la terrasse d'une brasserie ne sont guère plus désagréables que le dédale souterrain de la gare de Lyon.
Et le TGV dans tout ça ?

C'est certainement très incongru de n'en pas vouloir, et pourtant ? Qu'est-ce qu'un tunnel ferroviaire apportera à "nos territoires" comme ils disent ? Une gare dans l'Allier, au mieux car il faudra bien bifurquer à l'est pour desservir le sud par la vallée du Rhône (c'est le désengorgement de la desserte actuelle qui domine de loin la desserte du Massif Central) et Clermont-Ferrand sera content de son statut de cul-de-sac au bout d'un barreau à petite grande vitesse.
Outre le grand fracas des milliards nécessaires à la chose une ou deux conséquences sont d'ores et déjà prévisibles. Les lignes actuelles pour gagner la capitale par l'est Moulins, Nevers ou par l'ouest Montluçon, Bourges, ne survivraient pas longtemps à la chose et le peu de cas qu'on fait aujourd'hui de leur entretien et de la qualité du service qui s'y rend en préfigurent assez bien l'abandon.
Quant au transport aérien et à sa pérennité sur le site d'Aulnat, il verrait certainement le ciel s'assombrir...
Ne peut-on pas réfléchir autrement ? Ne peut-on pas poser la question simple des transports publics adaptés au maillage territorial et aussi et surtout au besoin d'un développement économique qui doit d'abord passer par la case maintien et contestation de la casse.
La liaison Allier-Paris ou plus largement Auvergne-Paris par TGV apportera quoi aux habitants du Puy ou d'Aurillac sinon la fierté illusoire d'une modernité qui leur coûtera plus de temps pour aller rejoindre le fauteuil de leur TGV qu'il n'en faudra pour aller fouler un quai de la gare de Lyon ? Les bourbonnais seront eux les heureux privilégiés détenteurs d'une gare que les nostalgiques du tacot de Trézelles  auront plus vite fait de gagner que les étudiants d'Hérisson qui peuvent encore monter dans le train de Paris en gare de Vallon en Sully.
Et si le progrès et l'humain étaient d'abord ailleurs... Dans la modernisation et l'entretien des lignes existantes pas exemple... si cela passait par une rénovation des lignes pour éviter les passages au ralenti sur des rails aussi inconfortables que nos routes de campagne... Les temps de trajet et le confort du voyage y gagneraient certainement assez pour la satisfaction de tous.
Faut-il évoquer la saignée environnementale du projet TGV que Saint-Pourçain veut bien, mais pas dans ses vignes... Celle de l'autoroute ne suffit-elle pas à balafrer notre département du nord au sud ?
Quant à l'impact économique, et à ses corollaires sociaux le projet TGV ne sert-il pas d'écran de fumée pour exonérer les décideurs économiques ou politiques de leur incapacité à maintenir l'activité existante avant même d'en générer de nouvelles ? L'effet autoroute serait intéressant à évaluer à cet effet.
Les tendances lourdes sous tendues par des orientations politiques et économiques libérales poussent à la métropolisation, à la désertification rurales et à la paupérisation des pôles urbains secondaires. La ligne TGV participe de ce principe tout comme les grand projets autoroutiers dont les concessions valent plus pour les actionnaires que pour l'usage ordinaires des populations.
Ne voit-on pas à l'occasion des départs en vacances des automobilistes clients moutons des autoroutes à péages aussi ignorant du réseau routier que les consommateurs de poisson pané sont ignorants de la pêche et des poissons ?
Reprendre les choses par le bon bout, s'interroger sur l'avenir qu'on dessine au peuple comme à sa terre, inventorier des ressources et inventer des usages en adéquation avec les besoins, et peut-être qu'en préservant la liberté et l'égalité on n'aurait moins besoin de brandir la fraternité comme excuse et triste adjuvant d'un fatalisme austéritaire. 
A quoi sert l'autoroute si c'est pour qu'un bébé meurt dans l'accouchement douloureux d'une mère à sa barrière de péage ?
Le temps de la gabelle et de l'octroi, c'était hier.
Celui de la TVA et des péages ne mériterait-il pas aujourd'hui la levée d'une petite révolution ?

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