jeudi 29 décembre 2011

Société

nuitdu4aoutLa crise a bon dos… Pour beaucoup elle serait la cause de tous les maux dont souffre notre société, la chute de l’économie des pays, l’explosion de la précarité, de la pauvreté et de toutes les misères, le chômage de masse qui continue de croitre…
Le discours était le même avec la crise précédente, et, en plongeant dans les souvenirs plus anciens on en retrouverait la copie à l’occasion des crises plus anciennes.
Et si la confusion était entretenue très volontairement entre les causes et les conséquences… et si tout se passait comme si le pouvoir en place, serviteur zélé des intérêts des possédants, fervent défenseur de l’économie de marché, abusait l’opinion en lui faisant prendre ses vessies pour des lanternes…
Que la crise engendre les difficultés qu’on connait est une évidence. La financiarisation à outrance de l’économie conjuguée à la perte de contrôle des états sur ses secteurs vitaux conduit aux pires désastres dès lors que la machine s’emballe, et que la course au profit de joue des plus élémentaires prudences.
Mais, aussi bien les mécanismes qui ont engendré la crise que les soit-disant remèdes que le capitalisme propose ne sont que les deux faces de la même pièce. La crise est un processus mortifère, un cercle vicieux entretenu, dont on ne peut sortir qu’en remettant fondamentalement en cause les ressorts qui l’alimentent.

Le système bancaire dont les dérives sont aujourd’hui mises en lumière a une responsabilité écrasante, tout comme dans la crise des années 30. La course à l’échalote qui fait croire qu’il est toujours possible de créer de la richesse sans produire dans le seul jeu spéculatif exercé sur les matières premières, les productions ou la monnaie ne doit plus abuser les citoyens victimes du pillage capitaliste de la planète et de ses peuples.
La crise est bien la créature du système qui n’invite à sa table que celles et ceux qui sacrifient jusqu’à leurs petits pour se survivre.
Les grands groupes industriels cotés en bourse pratiquent depuis longtemps le rachat de leurs propres actions pour en renchérir la valeur en en raréfiant l’offre sur le marché. Tout n’est que jeu sur le plateau du grand Monopoly capitaliste. Tout n’est que jeu pour les maîtres du jeu ! pour les autres la vie est différente, c’est celle de la dure réalité des sacrifices, de l’austérité, du pressurage permanent. L’accumulation de richesse du côté des nantis ne se fait qu’au détriment du plus grand nombre maintenu dans le dénuement et maintenant des couches intermédiaires des sociétés développées.
Si l’on s’en tient à la définition qu’en donne Fichter, la “société” se définirait au travers de l'« ensemble des modèles d'organisation et d'interrelation, des individus et des groupes, des associations, des organisations et des institutions qui concourent à la satisfaction concertée des besoins de la collectivité. »
Cette définition est intéressante de par l’expression de la finalité de l’organisation sociale de l’humanité : concourir à la satisfaction des besoins de la collectivité de façon concertée.
Partant de là il est aisé de saisir les ressorts du drame que le capitalisme fait vivre à l’humanité toute entière.
La notion de collectif est aujourd’hui disqualifiée, mise hors jeu par la poussée de l’individualisme. Autant le collectif porte la coopération, autant l’individualisme va soutenir la concurrence et l’élitisme.
Evoquer la satisfaction des besoins paraît bien dérisoire au moment où toutes les mesures gouvernementales des pays occidentaux malmenés par la crise conduisent à l’abandon de pans entiers de protection et d’accompagnement social. La division par trois des effectifs de jeunes enfants scolarisés en maternelle depuis de Sarkozy est au pouvoir symbolise aussi bien la chose que l’explosion des effectifs des bénéficiaires des Restos du cœur.
Rien n’a plus cours aujourd’hui qui puisse concourir au “faire société”.
Du coup, un peu comme de nouvelles ligues de vertu, des humanistes se laissent piéger par les fossoyeurs de notre société en développant une infinité de dispositifs sensés “faire société”, quelques ilots d’accueil respectueux et attentif, un secours adapté à la difficulté du moment, qui, au bout du compte se révèlent n’être qu’emplâtres sur jambes de bois. En agissant de la sorte les maîtres de la situation neutralisent au moins trois forces qui devraient lutter avec acharnement pour les vaincre :
  • les bonnes volontés engagées dans le secours sous couvert de solidarité voient leur démarche prendre tellement d’importance qu’ils doivent s’organiser en véritables entreprises et toute leur énergie, à côté du bienfait qu’elle procure aux plus démunis, concourt à institutionnaliser le dispositif, dédouanant ainsi les fauteurs de misère de leur responsabilité. Sarkozy peut ainsi impunément visiter des locaux des Restos du Cœur et se féliciter de leur action. Le pyromane s’insinue parmi les pompiers !
  • Les institutions, collectivités en charge de la solidarité et de l’action sociale se font triplement piéger. Elles manquent des moyens nécessaires à l’action locale par défaut de transferts de ressources d’Etat. Elle se félicitent de l’efficacité de leur intervention, sans avoir conscience que les “fournisseurs de misère” se chargent d’alimenter sans cesse un peu plus leur “clientèle” potentielle et vont revendiquer et s’enorgueillir de cette action dont elles ne sont que gestionnaires tout en étant à la peine faute de moyens suffisants.
  • Les bénéficiaires sont également pris au piège dans ce processus de réalimentation permanente du foyer qui fait gonfler indéfiniment  leurs effectifs et qui les classe dans une logique ségrégative anéantissant toute velléité d’en sortir. Ils sont ainsi ballotés de dispositifs en dispositifs, de secours en secours, au gré des opportunités locales. C’est ainsi que Restos du cœur, Samu social, Secours Catholique ou Secours Populaire, Croix Rouge frémissent du formidable engagement militant des bénévoles transformé peu à peu en employés d’entreprises de service spécialisées dans l’accompagnement de la misère. La loi du marché s’impose, les “bénéficiaires” se constituent en “clientèle” pour parachever le saucissonnage de la société en autant de tranches qu’il faut faire d’envieux du tout petit surcroit de bien du voisin et d’indifférents aux montagnes de biens accaparés par les plus puissants sur le dos des plus faibles.
Les marionnettistes du capital, qu’ils s’agitent à l’Elysée, à Bruxelles ou ailleurs, tirent toujours les ficelles de la division et le rideau de fumée qui les tient à l’abri du regard des foules de leurs victimes. Dans le même temps il entretient aussi la suspicion –Sarkozy n’a-t-il pas relancé la chasse à la fraude sociale récemment en stigmatisant des bénéficiaires indélicats tout en en oubliant, ce ne peut être qu’un pur hasard, le volet patronal et les manquements de l’Etat à ses propres règles- qui va engendrer méfiance envers les boucs émissaires désignés : on va parler d’assistanat pour le condamner de la même façon qu’on peut entendre associés chômage et paresse, maladie et "j’en foutisme, etc. Tous les stigmates de la pensée libérale des commis de Sarkozy.
Des incontournables dans cette tourmente de travestissements de la réalité et de négationnisme social :
  • La discrimination sociale, la précarité, la mal vie et la pauvreté sont des faits, des effets, et ce sont les forfaits quotidiens du capitalisme régnant.
  • Les privilèges de la fortune, l’indécence exhibitionniste des grands possédants et des pouvoirs qui les servent puent la gangrène du système imposé par la force, jusqu’à celle des canons.
  • l’indignation rampante peine à se dégager de la pression des menaces qui pèsent sur la survie au quotidien
  • le salut dans l’action collective, qu’elle soit syndicale au travail, politique dans les urnes, ou banale dans la rue manifestante, est tellement oublié sous la pression d’un individualisme forcené que le refuge dans l’attente miraculeuse des jeux ou de la résignation fataliste sont le plus souvent constatés.
Mais la vraie vie n’est pas là, dans le grattage fébrile d’un carton coloré de la Française des jeux, dans les volutes d’un joint roulé en tremblant, dans l’ivresse express d’une fin de semaine étudiante, dans les cartons glacés des SDF, dans les files d’attente de la soupe populaire…
La vie passe par la lutte, résolue et sereine, de citoyens conscients que, si la voie des urnes est souvent considérée comme l’accessoire banal de la démocratie, ses limites peuvent être atteintes ou dépassées.
Souvenons-nous que, voilà plus de soixante ans, quelques uns se sont levés au péril de leur vie pour dessiner au travers du programme du Conseil National de la Résistance, les grandes ligne de ce qui allait garantir le rétablissement de la République et de ses valeurs sur les terres de France. La mise en œuvre de la plupart des préconisations du CNR ouvrirent la voie des “trente glorieuses” et installèrent un modèle français dont la dimension sociale a longtemps été enviée de par le monde.
C’est bien une démarche similaire qu’il nous faut reconduire aujourd’hui face aux démolisseurs qui nous gouvernent et qui viennent de capituler devant les exigences des puissances d’argent en proposant un nouveau traité européen. Ils veulent faire de tous les états européens les petits valets collaborateurs soumis du système bancaire et d’une petite oligarchie européenne.
Tout ce qui fait la société est à rétablir, à commencer par la conviction que les hommes sont faits pour vivre en société et qu’ils peuvent délibérer ensemble des modèles d’organisation et de partage les plus appropriés à l’épanouissement de tous.
Plus que jamais l’heure est à la RESISTANCE pour reconstruire une société des hommes, plus juste et plus libre, une démocratie ordinaire dans laquelle les élus de demain ne rechaussent pas les bottes des marquis d’hier.

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