Quelle est la question de fond, celle de la réussite scolaire des élèves, une réussite de tous et non pas de quelques uns, ou celle d'une réforme économique de l'éducation nationale ?
Au point où nous en sommes la réponse est évidente : la réussite agitée en paravent des mesures d'austérité qui continuent de frapper le tissu scolaire piloté depuis les tours parisiennes n'est qu'un avatar du dispositif.
Au fond l'important était bien de déporter vers les collectivités une part de responsabilité de l'Etat garant de l'unité nationale du service public d'éducation. La municipalisation de l'école, prélude à son inter-communalisation, regroupements pédagogiques à la clé va apporter sa contribution à la désertification rurale et à la ghettoïsation des quartiers. La concurrence devient la règle entre les collectivités qui vont devoir arbitrer entre les TAP et les gilets pare-balle des garde-champêtres. Les pauvres continueront de se contenter d'un peu de garderie avant de rentrer à la maison avec le bus de ramassage, d'autres goûteront aux joies du centre équestre pour peu que les parents mettent la main au porte-monnaie.
A un moment où des événements dramatiques ont réveillé quelques consciences citoyennes dans la révélation du délabrement de pans entiers de notre société relégués hors les murs de la ville des riches, ne faudrait-il pas se poser la question de fond - comme les résistants du CNR l'avaient fait dans la rédaction du programme du CNR sous l'occupation nazie-, celle de la société que nous voulons.
Des grands principes organisationnels de la société envisagée découleront naturellement les impératifs d'organisation du système de formation, de celui de la santé et de la protection sociale, de celui du travail et de la répartition de ses fruits, etc.
Si on pose comme principe que le monde que nous voulons soit celui de la coopération, de la solidarité et du partage pour assurer les meilleures conditions de l'émancipation et de la responsabilité citoyenne, de la justice sociale et de la liberté, quel projet d'école devons nous construire ? Quelle conception du bien public doit-on promouvoir ? Et, comme nous ne vivons pas nulle part ailleurs, que donne-t-on à voir par quelle ouverture pour établir des relations extérieures susceptibles de dessiner des perspectives progressistes à l'échelle de l'Europe et du monde.
On est au moins sûr que ce n'est pas en organisant le tourisme de prosternation devant les pétrodollars des dynasties moyen-orientales dont on craint qu'elles financent aussi bien le sport spectacle que le terrorisme. Les deux conduisent d'ailleurs au même résultat pour garantir l'emprise du pouvoir sur des peuples faibles pris par la peur ou qui se satisfont de plus de jeux pour manger moins de pain.
Ce que le programme du CNR ouvrait comme perspective de reconstruction républicaine :
Extrait du titre 21 du programme du CNR écrit de mai 1943 à mars 1944...
"
II - MESURES À APPLIQUER DÈS LA LIBÉRATION
DU TERRITOIRE
Unis quant au but à atteindre, unis quant aux
moyens à mettre en oeuvre pour atteindre ce but qui est la Libération rapide du
territoire, les représentants des mouvements, groupements, partis ou tendances
politiques, groupés au sein du C.N.R. proclament qu'ils sont décidés à rester
unis après la Libération :
1.
Afin d'établir le
gouvernement provisoire de la République formé par le Général de Gaulle pour
défendre l'indépendance politique et économique de la nation, rétablir la
France dans sa puissance, dans sa grandeur et dans sa mission universelle ;
2.
Afin de veiller
au châtiment des traîtres et à l'éviction dans le domaine de l'administration
et de la vie professionnelle de tous ceux qui auront pactisé avec l'ennemi ou
qui se seront associés activement à la politique des gouvernements de
collaboration ;
3.
Afin d'exiger la
confiscation des biens des traîtres et des trafiquants de marché noir,
l'établissement d'un impôt progressif sur les bénéfices de guerre et plus
généralement sur les gains réalisés au détriment du peuple et de la nation
pendant la période d'occupation, ainsi que la confiscation de tous les biens
ennemis y compris les participations acquises depuis l'armistice par les
gouvernements de l'Axe et par leurs ressortissants dans les entreprises
françaises et coloniales de tout ordre, avec constitution de ces participations
en patrimoine national inaliénable ;
4.
Afin d'assurer :
·
l'établissement
de la démocratie la plus large en rendant la parole au peuple français par le
rétablissement du suffrage universel ;
·
la pleine liberté
de pensée, de conscience et d'expression ;
·
la liberté de la
presse, son honneur et son indépendance à l'égard de l'État, des puissances
d'argent et des influences étrangères ;
·
la liberté
d'association, de réunion et de manifestation ;
·
l'inviolabilité
du domicile et le secret de la correspondance ;
·
le respect de la
personne humaine ;
·
l'égalité absolue
de tous les citoyens devant la loi ;
5.
Afin de
promouvoir les réformes indispensables :
a.
Sur le plan
économique :
- l'instauration
d'une véritable démocratie économique et sociale, impliquant l'éviction
des grandes féodalités économiques et financières de la direction de
l'économie ;
- une
organisation rationnelle de l'économie assurant la subordination des
intérêts particuliers à l'intérêt général et affranchie de la dictature
professionnelle instaurée à l'image des États fascistes ;
- l'intensification
de la production nationale selon les lignes d'un plan arrêté par l'État
après consultation des représentants de tous les éléments de cette
production ;
- le
retour à la nation des grands moyens de production monopolisés, fruit du
travail commun, des sources d'énergie, des richesses du sous-sol, des
compagnies d'assurances et des grandes banques ;
- le
développement et le soutien des coopératives de production, d'achats et
de ventes, agricoles et artisanales ;
- le
droit d'accès, dans le cadre de l'entreprise, aux fonctions de direction
et d'administration, pour les ouvriers possédant les qualifications
nécessaires, et la participation des travailleurs à la direction de
l'économie.
b.
Sur le plan
social :
- le
droit au travail et le droit au repos, notamment par le rétablissement et
l'amélioration du régime contractuel du travail ;
- un
rajustement important des salaires et la garantie d'un niveau de salaire
et de traitement qui assure à chaque travailleur et à sa famille la
sécurité, la dignité et la possibilité d'une vie pleinement humaine ;
- la
garantie du pouvoir d'achat national par une politique tendant à la
stabilité de la monnaie ;
- la
reconstitution, dans ses libertés traditionnelles, d'un syndicalisme
indépendant, doté de larges pouvoirs dans l'organisation de la vie
économique et sociale ;
- un
plan complet de sécurité sociale, visant à assurer à tous les citoyens
des moyens d'existence, dans tous les cas où ils sont incapables de se
les procurer par le travail, avec gestion appartenant aux représentants
des intéressés et de l'État ;
- la
sécurité de l'emploi, la réglementation des conditions d'embauchage et de
licenciement, le rétablissement des délégués d'atelier ;
- l'élévation
et la sécurité du niveau de vie des travailleurs de la terre par une
politique de prix agricoles rémunérateurs, améliorant et généralisant
l'expérience de l'Office du blé, par une législation sociale accordant
aux salariés agricoles les mêmes droits qu'aux salariés de l'industrie,
par un système d'assurance contre les calamités agricoles, par
l'établissement d'un juste statut du fermage et du métayage, par des
facilités d'accession à la propriété pour les jeunes familles paysannes
et par la réalisation d'un plan d'équipement rural ;
- une
retraite permettant aux vieux travailleurs de finir dignement leurs jours
;
- le
dédommagement des sinistrés et des allocations et pensions pour les
victimes de la terreur fasciste.
6.
Une extension des
droits politiques, sociaux et économiques des populations indigènes et
coloniales.
7.
La possibilité
effective pour tous les enfants français de bénéficier de l'instruction et
d'accéder à la culture la plus développée quelle que soit la situation de
fortune de leurs parents, afin que les fonctions les plus hautes soient
réellement accessibles à tous ceux qui auront les capacités requises pour les
exercer et que soit ainsi promue une élite véritable, non de naissance mais de
mérite, et constamment renouvelée par les apports populaires.
Ainsi sera fondée une République nouvelle qui
balaiera le régime de basse réaction instauré par Vichy et qui rendra aux
institutions démocratiques et populaires l'efficacité que leur avaient fait
perdre les entreprises de corruption et de trahison qui ont précédé la
capitulation. Ainsi sera rendue possible une démocratie qui unisse au contrôle
effectif exercé par les élus du peuple la continuité de l'action
gouvernementale.
L'union des représentants de la RÉSISTANCE
pour l'action dans le présent et dans l'avenir, dans l'intérêt supérieur de la
patrie, doit être pour tous les Français un gage de confiance et un stimulant.
Elle doit les inciter à éliminer tout esprit de particularisme, tout ferment de
division qui pourraient freiner leur action et ne servir que l'ennemi.
En avant donc, dans l'union de tous les
Français rassemblés autour du C.F.L.N et de son président, le général De Gaulle
!
En avant pour le combat, en avant pour la
victoire, afin que VIVE LA FRANCE !
LE CONSEIL
NATIONAL DE LA RÉSISTANCE "
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