samedi 17 août 2019

L'ordre des choses

Au détour d'une visite la curiosité est parfois accrochée au mur...


Aux confins du Berry et du Nivernais, près du confluent de l'Allier avec la Loire, le village d'Apremont, -fort beau au demeurant après qu'il fut reconstruit de la fortune des Schneider- s'étend aux pieds du château, imposant édifice campé sur le talus de la rive gauche de l'Allier.
Comme dans tous les villages de France, au sortir de la Première Guerre Mondiale un monument a été érigé pour rendre hommage aux soldats "Morts Pour La France". Pour petit qu'il soit, le village d'Apremont est riche de deux objets mémoriels rendant cet hommage : une plaque est apposée au mur sud à l'intérieur de l'église, et une autre en stèle sur la place du village fait office de Monument aux Morts.
La plaque de l'église liste les victimes du grand carnage dans un ordre qui aurait un fumet d'Ancien Régime si elle ne mettait pas en tête la grande bourgeoisie des Maîtres de Forges devant le triptyque ordonné Noblesse, Clergé et "Tiers-Etat". 1793 était passé par là pour sceller le grand remplacement de l'aristocratie de la noblesse par la fortune de la grande bourgeoisie.

La plaque de la Place Publique est respectueuse de l'ordre alphabétique des patronymes.

Détail anodin ?
Pas si sûr... 
C'est un signe quand on rapproche les choses de leur temps, une génération à peine après que notre République ait légiféré sur sa laïcité, les stigmates de l'Ancien Régime resurgissent pour contester la majorité citoyenne du peuple et lui signifier sa sujétion à des forces qui lui échappent.

Ne devrait-on pas s'interroger quand, sous couvert du patrimoine, on voit se banaliser aujourd'hui l'affichage du fait religieux, ou proliférer les usages du thème de l'ordre policier ou militaire au point de faire de la violence un phénomène habituel et de la guerre notre triste ordinaire ?

Les châteaux (peuplés de chevaliers en armes...) comme les édifices religieux (des aumôniers accompagnant les morts vivants en uniforme...) ne manquent pas d'afficher leur richesse patrimoniale, tout en instillant leurs valeurs fondatrices sous le vernis transparent de l'industrie du tourisme.
Beaucoup plus rares sont les marques témoignant du travail et du génie des hommes industrieux, dans les fabriques des villes comme dans les champs des campagnes.

Les trois termes de notre devise Républicaine n'auraient-ils pas besoin d'être redorés aux frontons des édifices publics ? si tant est qu'il en reste ! 

... pour qu'enfin ils nous foutent la Paix, tant occupés qu'ils sont à faire briller leurs particules et leurs breloques.

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