dimanche 14 avril 2013

Existences confisquées

L'existence est à la vie ce que l'intelligence est à la pensée. Il ne suffit pas d'être pour exister, encore faut-il être pour les autres, être en dehors de soi. Quand l'existence manifeste la réalité des choses, des êtres et des faits c'est bien de reconnaissance qu'il s'agit. La féodalité a existé tout autant que l'esclavagisme au travers du processus de reconnaissance du maître ou du suzerain par l'esclave ou l'inféodé. Le monde et les temps ont changé, certes, mais pour certains encore aujourd'hui l'existence relève toujours du privilège de l'asservissement, de l'inféodassions, de l'assujettissement. Et la lecture de Pascal ou des encyclopédistes, de Hugo ou Zola, de Marx ou de tant d'autres laisse à penser que si l'émancipation des hommes, la liberté et la démocratie, la paix et la coopération sont depuis des siècles des concepts bien pensés mais entravés dans leur processus de reconnaissance au point de rester lettre morte, sans existence véritable.
Nous entendons parfois dire que "nous vivons dans un monde de paix" ; mais Mali, Moyen-orient, Afghanistan, le monde vit sous le fracas des armes...
Nous entendons parfois dire que la France fait partie du monde "libre" ; mais il est vrai que des travailleurs restent pauvres au point d'être sans domicile, que plus d'un jeune sur quatre est tellement libre du choix de l'employeur qu'il recherche...
Nous entendons souvent dire que nous vivons sous l'empire de la "démocratie" : mais celles et ceux qui en sont maîtres s'en trouvent si bien qu'ils en font leur métier en décrétant que le candidat doit être élu puisque l'élu devait être candidat... tout en agitant l'arlésienne du non cumul des mandats...
Le monde de l'entreprise comme le monde politique, fournissent de belles illustrations de la négation d'existence universelle pour mieux asseoir la domination nécessaire à l'exploitation de la force ou du talent du peuple au profit de ses maîtres.
Dans un cas comme dans l'autre l'imagination regorge d'initiative susceptible de contenir les espoirs d'émancipation dans des dispositifs où la participation active des individus reste bien encadrée et sous pression.
L'existence des salariés dans l'entreprise passe par des institutions représentatives dont les marges de manoeuvres sont bien étroites et pour lesquelles la concurrence partisane consomme beaucoup de l'énergie due au combat de classe face au patronat.
L'existence citoyenne est aussi mise à rude épreuve, même et surtout si, pour en donner l'illusion on met en place des dispositifs d'expression comme les "primaires". L'exercice en illustre vite la limite, qu'elles soient internes et dresse les coqs de combats sur leurs egos ou qu'elles soient ouvertes et que l'extérieur fasse pression sur le choix partisan...

Les exigences des révolutionnaires d'antan n'ont rien perdu de leur fraîcheur et de leur actualité et il serait grand temps de redonner confiance au peuple qui se défait trop de ses prérogatives en restant spectateur indifférent ou adorateur béat des gesticulations du pouvoirs en quête de légitimité.
Les coalitions d'égoïsmes ne font pas exister la solidarité ; et pour que la démocratie soit une pratique effective, encore faut-il que le peuple existe, librement.

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