jeudi 23 octobre 2014

Tout vient à point à qui sait attendre

Depuis des mois, voire même des années, l'idée selon laquelle la reconstruction de la gauche passerait par l'implosion du Parti Socialiste était regardée avec un sourire aussi amusé qu'incrédule... un bipartisme bien installé et renforcé par le renversement du calendrier législatives-présidentielles, le recentrage à droite comme à gauche au prétexte de "l'ouverture"...
A droite comme à gauche, ce ne sont plus trop les idées qui font débat, mais les gesticulations de marionnettes agitées par les mains habiles des puissances financières qui font et défont à leur guise les gouvernements des pays dits "libres".
Que l'ont soit en mesure de mettre côte-à-côte le "J'aime l'entreprise" de Valls aujourd'hui et le "mon ennemi, c'est la finance" de  Hollande avant-hier n'est possible qu'en considérant ce qui s'est passé hier sur l'échelle du temps : l'élection.
Il ne s'agit ni d'une versatilité excessive, ni même d'une trahison -les promesses n'engagent que ceux qui y croient-, mais bien d'une manipulation de l'opinion dans un paysage politique où le pouvoir, accaparé au fil du temps et tenu à l'abri de l'action citoyenne, n'est plus l'affaire que d'une classe dirigeante qui n'a pas plus conscience de sa faiblesse et de son isolement que Louis XVI au printemps 1789.
Mitterrand en son temps avait soit-disant fait gagner la gauche en 1981 après avoir promis à Vienne à ses amis de l'Internationale socialiste de réduire l'influence des communistes français à moins de 5%... Réussite inespérée avec l'aide de Robert Hue et de quelques autres ! L'épisode du revirement de 1983 et tous les ricochets qui l'ont suivi n'ont-ils pas depuis ce temps fait progresser plus vite le chômage et son cortège de précarité et de misère que les idées progressistes et le service public ? N'a-t-on pas depuis ce temps tenu sous l'éteignoir toute velléité de contestation en offrant généreusement, telle baguette de barbe-à-papa en fête foraine, quelques places au râtelier  aux moins regardant sur l'éthique et la ligne idéologique, récompense indemnitaire à la clé ?
Le spectacle affligeant donné aujourd'hui par le parti socialiste au pouvoir ne doit rien  au hasard. Dominique Straus Kahn, Jérôme Cahuzac et le très éphémère secrétaire d'Etat Thomas Thévenou -toujours député- ont de façon emblématique et chacun à leur façon assuré la promotion du système qui les avait accouché.
Et dans ce paysage de désolation, il n'est pas question de se laisser aller à entonner le refrain préféré de l'extrême droite du "tous pourris", car ce n'est qu'un couplet de la même chanson.
Se poser la question du choix de Hollande qui propulse Valls à Matignon (le monsieur 5% des primaires socialistes" permet d'entrevoir les contours du problème.
Comme en bien d'autres moments de l'histoire la social-démocratie française se fait obéissante aux injonctions du capital. La non-intervention pour secourir les Républicains espagnols des griffes de Franco... Jules MOCH qui fait tirer sur les mineurs grévistes... Guy MOLLET qui rappelle les citoyens pour en faire les soldats de la Guerre d'Algérie... 
Il ne s'agit pas d'une litanie désespérante de reniements des causes justes de ce qu'est la gauche en France, une gauche enracinée profondément dans des siècles d'histoire pour faire fleurir l'émancipation du peuple au fronton des édifices publics de notre République.
La droite revancharde peut à peine goûter aux plats qu'on lui sert chaud, tellement elle est engluée dans les affaires politico financières et les guerres  de chefferie. Et tout naturellement, dans un partage bien ordonné des rôles de la comédie du pouvoir, elle chasse d'autant plus sur les terres de l'extrême droite que les socialistes courtisent le centre. 
C'est le MEDEF qui veut ça... non ?
"s'il fallait être poli pour réussir en politique, ça se saurait..." cette citation favorite des soutiens de Sarkozy dans son "combat fratricide" avec Juppé n'a malheureusement pas d'usage qu'à droite.

Alors que Hamon, et quelques autres ministres fraîchement débarqués n'aient pas la politesse de se taire en sortant de table n'est que la manifestation du franchissement d'une nouvelle étape dans la déliquescence du PS.
Chevènement en son temps, Mélenchon plus tard, des "frondeurs" plus récemment ne sont que les éclats, copeaux ou sciure déposés en chemin au fil des amputations que le pouvoir impose à son corps électoral.
Pour accompagner un temps le parti socialiste dans sa galère, le parti communiste n'a fait guère mieux et largement contribué à l'émiettement d'une gauche dans laquelle il est plus glorieux aujourd'hui de flatter les égos à la tête d'une multitude de petites chapelles ou fondu dans des rassemblements à géométrie variable disqualifiant toujours les organisations mères jugées trop peu "modernes".
Hamon autres rebelles de la vingt-cinquième heures ne sauveront pas le parti socialiste ; tout au plus ils en précipitent la chute nécessaire -mais pas suffisante- à la refondation d'une gauche politiquement capable de gouverner la France.
Il y faudra des structures d'accueil, charpente et fondations confondues, un parti communiste comme la France en a connu parfois y trouverait sa place toute naturelle, utile à son peuple.
Servir plutôt que se servir... 
... l'éclatement du parti socialiste (tout comme les partis de droite se sont reconfigurés à l'épreuve du pouvoir) n'est pas une condition suffisante, car la solution passe par le peuple et son exigence révolutionnaire d'un véritable changement de régime -certains l'appelle 6ème République, pourquoi pas !- ; sinon ce serait se résoudre au passage par l'expérience de l'extrême droite dont la menace est brandie en épouvantail par ceux qui la nourrissent. 

On ne fait pas l'omelette d'aujourd'hui avec les coquilles de celle d'hier.
La Révolution est neuve ou n'est pas.
Plus que jamais il est utile de penser le changement plutôt que de changer de pansement.

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